Note du blogmaster: malheureusement, dans les quelques dernieres semaines, je n'ai pas pu mettre a jour le blog et y ajouter des photos regulierement. Maintenant que je suis arrive a Kolkatta (Calcutta), j'ai pu telecharger beaucoup d'images et ecrire beaucoup de commentaires car ici il y a de bons cafes internet. Mais ca fait que Varanasi, Darjeeling et Kaziranga sont arrives tous d'un coup sur le blog. Et puis je n'ai toujours pas eu le temps de relater mon safari a dos de dromadaire dans le desert du Thar, lorsque que j'ai mange du lezard et que je me suis fait mordre a l'oreille par un scarabee. J'espere pouvoir le faire bientot. Pardonnez-moi cette anomalie, fideles lecteurs.
Et voila, adieu Shiva, adieu les vaches de la rue, adieu le tchai, je m'envole ce soir vers des cieux plus propices, vers un pays de legende aux 18000 iles qui accueillent le visiteur avec du sable chaud au gout de miel. Demain, l'Indonesie.
Je me suis debarrasse de mon guide Lonely Planet sur l'Inde. Aujourd'hui, il ne me reste qu'a aller voir, au jardin botanique de Kolkatta, le deuxieme plus gros banyan du monde. Le banyan, arbre sacre pour les hindous, etend son territoire au moyen de ses racines qui pendent de ses branches puis se fixent sur le sol. Le banyan de Kolkatta a une circonference de plus de 400 metres. C'est certainement l'un des plus grands etres vivants de la planete.
28 novembre 2005
Kaziranga
Moi qui suis un fetard, j'estime le budget pour une bonne soiree a Zurich a environ cent francs: quelques bonnes bouteilles avant de sortir, 30 boules pour l'entree a la Dachkantine et le reste en bieres et cuba libre en soiree. Ainsi, je n'ai pas eu de scrupules a depenser une petite somme pour pouvoir jouir des merveilles du parc national de Kaziranga. Avec ca, j'ai depasse mon budget qui est fixe a 1500 francs par mois, 50 francs par jour. C'est un budget tres large pour un pays comme l'Inde...
En partant des plaines centrales du subcontinent et en contournant le Bangladesh par le nord, on debouche sur les etats du Nord-Est Indien, entoure par le Bhutan et la Chine (Tibet) au nord, par la Birmanie (Myanmar) a l'est et par le Bangladesh au sud et a l'ouest. L'etat d'Assam en forme la partie centrale et est traverse par le puissant Bramaputra, dont la largeur atteint 10 km a certains endroits et qui se deverse dans le delta du Deccan apres avoir mele ses flots a ceux du Gange, au-dessus de Calcutta. L'Assam est couvert de plantations de the et de rizieres, ces paysages etant agrementes de nombreux palmiers: cocotiers, bananiers et arbres de betel. Les etats du nord-est de l'Inde sont regulierement secoues par des troubles ethniques, provoques par les nombreux tribus indigenes qui reclament l'independance. Mais le parc national de Kaziranga, au centre de l'Assam, est un havre de paix qui abrite un animal magnifique, le rhinoceros a une corne (they call him the Great Indian One-horned Rhino).
Plus de 1500 rhinoceros vivent dans le sanctuaire. Y sejournent egalement d'importantes populations de buffles sauvages, d'elephants asiatiques, de stegosaures, d'oiseaux et de tigres. On peut faire des safaris a dos d'elephants, ce qui permet de se frayer un chemin a travers les hautes herbes des marais, et d'approcher les rhinoceros et les buffles de tres pres sans les effaroucher.
Les elephants sont vachement rigolos, surtout depuis derriere. On dirait qu'ils ont enfiles des pantalons de pyjamas trop grands pour eux. En plus ils marchent en balancant leurs pattes arrieres a gauche et a droite comme un grand-papa nonchalant. Mais ce sont de puissants animaux. J'ai file une banane a l'un d'eux et il en a profite pour me serrer la main avec sa trompe. Eh bin, porca madonna, un elephant a beaucoup plus de force dans sa trompe qu'un type en a dans sa main. En fait, c'est peut-etre evident, mais je n'avais jamais pense a ca.
Alors, l'elephant est le seul mammifere qui ne puisse pas sauter, d'accord; mais quel est la difference entre l'elephant africain et l'elephant asiatique? L'elephant asiatique est plus petit et a en particulier de bien plus petites oreilles. Il se distingue par un dos arrondi et deux bosses sur le devant de la tete. Et puis l'elephant asiatique n'a qu'une levre au bout de la trompe, tandis que l'elephant africain en a deux, avec lesquels il peut saisir des machins comme avec une main.
Les rhinoceros a une corne sont egalement plus petits que leurs potes africains. Bien qu'ayant retabli une population viable, contrairement aux rhinoceros de Java et de Sumatra, les rhinoceros indiens sont toujours gravement menaces, devinez a cause de qui, a cause des chinois qui pensent que leurs djibas se dresseront avec plus d'entrain s'ils sniffent de la poudre de corne de rhino. De ce fait, la lutte contre le braconnage est absolument draconienne a Kaziranga: il y a 3 jours, 2 braconniers ont ete descendus par les gardes du parc alors qu'ils chassaient le rhino. Sans autre forme de proces, apparemment...
La troisieme espece locale qui impressione par sa taille est le buffle sauvage indien, qui mesure deux metres et pese jusqu'a 1,2 tonnes (les taureaux qui hantent les arenes espagnoles ne font generalement pas plus d'un quintal). Ses magnifiques cornes peuvent avoir jusqu'a 2,75 d'envergure.
Pendant mes safaris, j'ai egalement eu le privilege de contempler trois loutres qui se reposaient sur une rive apres la peche. Voila des animaux qu'ils sont chous et elegants, les loutres. C'etait le plus beau moment du safari, car les loutres sont difficiles a observer, et parce que ca m'a fait penser a un ami biologiste blond qui m'est cher. Les martins-pecheurs, autres animaux insaisissables, etaient egalement tres nombreux dans le parc. Enfin, il y avait des pelicans, et des oies de Siberie, oiseaux migrateurs infatigables reputes pour leurs vols au-dessus de l'Himalaya, a plus de 6000 metres d'altitude.
27 novembre 2005
De haut en bas: Khandchendzonga, 8598 m. Khangchendzonga et moi. Shittie, mon petit compagnon nepalais.
Incursion dans l'Himalaya
Faune et Flore de l'Himalaya
2000 metres de denivellation separent Siliguri, juste au-dessus du Bangladesh, de Darjeeling, station touristique celebre pour son the. C'est une ascension vertigineuse pour entrer dans l'enorme forteresse qu'est la chaine de l'Himalaya. La route sinueuse m'a fait penser a la tristement fameuse Route de la Mort pres de La Paz, a la seule difference qu'ici, on apercoit encore le bord de la route en regardant par la fenetre du bus. En trois heures de temps, on passe des plaines chaudes du nord de l'Inde a de froides montagnes. Mais arrive a Darjeeling, on est surpris de decouvrir une vegetation luxuriante couvrir les montagnes avoisinantes. Moi qui adore la nature, j'ai ete everveille par la faune et la flore uniques qui prosperent dans l'Himalaya. Les forets, veritables jungles d'une densite extraordinaire, se composent de pins de l'Himalaya, de cedres et de peupliers entoures de fougeres et d'enormes rhododendrons. Ces arbres sont eux-memes couverts de mousses, d'herbes et de plantes grimpantes de toutes sortes. Il y a deux especes de bambous, dont la plus grande jette au ciel ses pousses verticales, droites comme la queue de Rocco, a plus de dix metres de hauteur. Ces bambous sont d'une solidite a toute epreuve et sont utilises pour construire des echafaudages a travers l'Asie.
Dans ces forets vit le petit panda, creature de la taille d'un gros chat couverte d'une epaisse fourrure rousse, qui passe ses journees a sommeiller dans les arbres et descend la nuit pour se nourrir de pousses et de feuilles de bambous. Cette region de l'Inde abritait autrefois son cousin le grand panda, autre bouffeur de bambou, qui est maintenant confine au pays des bouffeurs de riz. Ici vit egalement la civette, sortre de martre au museau pointu et au poil dru et le loris qui a les habitudes et l'allure lente du paresseux d'Amazonie. L'ecureuil volant plane d'arbre en arbre en deployant la peau fine tendue entre ses quatre membres. L'ours de l'Himalaya, plutot paisible, arbore une demi-lune sur son torse. Sous de plus hautes altitudes on trouve des animaux plus spectaculaires comme le yak, qui n'apparait qu'a environ 5000 metres, le migou (yeti) qui aime le whiskey et le leopard des neiges. Je ne sais pas quel est l'altitude qui delimite l'aire de repartition du leopard commun, largement repandu dans tout le subcontinent, de celle du leopard des neiges. Au zoo himalayen de Darjeeling, il y avait une troisieme espece de leopard dont j'ignorais l'existence et qui surpasse les deux autres par sa beaute: le "clouded leopard" (leopard nuageux?), nomme ainsi a cause des grandes taches allongees qui couvrent son pelage.
Le the
La region reculee ou le Yang-Tse-Kiang et le Brahmaputra prennent leurs sources, aux confins de la Chine, du Bhutan et de l'Inde, est le lieu d'origine du the. Longtemps monopolisee par la Chine, sa production a ete etendue par le colon anglais a l'Assam, a la region de Darjeeling et aux collines du Sri Lanka (Earl Grey), entre autres. La methode de preparation du the noir, qui differe de celle du the vert traditionellement utilisee en Chine, a ete empruntee par l'Anglais aux ethnies tribales de l'Assam. A Darjeeling, l'octopus s'est faufile dans une fabrique de the pour assister a ces procedes de production.
Le the est un arbuste qui peut atteindre deux a trois metres de hauteur. Dans les plantations, la hauteur des plantes est maintenue a 60-70 centimetres par les coupes annuelles. Celles-ci sont destinees a faire jaillir de nouvelles feuilles des rameaux chaque annee. A la cueillette, seules les trois feuilles a l'extremite de chaque rameau sont recoltees. Ces feuilles sont placees sur une sorte de longue table a trous, par lesquelles souffle de l'air chaud. Les feuilles sechent ainsi pendant une vingtaine d'heures, ce qui reduit leur teneur en eau de 50-60%. Elles passent ensuite dans une centrifugeuse qui separe les feuilles les unes des autres, les font s'enrouler sur elles-meme et repoussent l'humidite vers leur surface. Les feuilles sont alors mises a fermenter pendant environ 3 heures de temps. Le temps de fermentation est crucial, car c'est elle qui donne au the sa saveur caracteristique. Les feuilles passent ensuite dans une machine a air chaud qui stoppe la fermentation et extrait l'humidite restante. Finalement, les feuilles assechees sont triees pour definir des thes de qualite et de prix differents: les dernieres feuilles qui venaient de bourgeonner donnent le the de plus haute qualite. Les deuxiemes et troisiemes feuilles forment les categories suivantes. Les morceaux de feuilles brisees et les tiges sont le the de qualite inferieure. Le the est ensuite envoye a Calcutta pour etre scrupuleusement goute et classe par des gouteurs de the professionels. Des sortes d'oenologues du the quoi.
Nepalais et Tibetains
La majorite des la population de la region de Darjeeling est nepalaise. Les Nepalais sont basanes comme les Indiens, mais ont le teint mat alors que les Indiens sont plus chocolat. Ils ont les yeux brides, mais pas autant que les Chinois, et des traits asiatiques, mais sans les pommettes saillantes des guerriers mongols. La langue nepalaise est sans relation avec l'Hindi, mais les deux utilisent la meme ecriture, qui ressemblent a des vetements mis a secher sur une corde. Et les Nepalais sont hindous de religion. Ils m'ont paru plus reserves et moins bruyants que les Indiens. Ils sont habilles de facon plus occidentale, les filles portent meme des jeans, ce qui est rare sur le subcontinent ou le sari est de mise.
A Darjeeling, il y a beaucoup de drapeaux tibetains (quel beau drapeau, presque aussi beau que celui de l'Argentine) et des portraits du Dalai-Lama dans tous les coins a cause de l'emigration tibetaine qui a eu lieu sous le coup de l'occupation coco-chintok. On peut gouter aux momos, delicieux raviolis a la viande frits ou cuits a la vapeur (ce sont les jiaozis chinois) et a la thugpa, la grosse soupe paysanne aux nouilles et a la viande. Yammy. La cuisine tibetaine est un delice.
Khangchendzonga
Tenzing Norgay Sherpa accomplit avec Edmund Hillary la premiere ascension de l'Everest en 1953 (avant cela, il avait accompagne les tentatives infructueuses suisses). Il a grandi a Darjeeling et il est le heros local. Le musee de l'Everest de Darjeeling lui est dedie, ainsi qu'a d'autres pointures de l'alpinisme. Reinhold Messner y figure parmi les plus illustres, lui qui inaugura une nouvelle route au sommet de l'Everest en solo et sans oxygene artificiel. Il est egalement le seul homme a avoir gravi les 14 pics culminant a plus de 8000 metres. Et moi qui n'en avais jamais entendu parler avant que notre ours grison tue l'un de ses yaks. Shame on me.
De Darjeeling, on apercoit le mont Khangchendzonga, qui culmine a 8598 metres, ce qui en fait le troisieme plus haut tas de cailloux au monde apres l'Everest (8848 m) et le K2 (8611 m).
Anniversaire belge
Le 17 novembre, arme d'une bouteille de pinard indien, je me levai a l'aube et me lancai sur les traces du capitaine Haddock a la conquete de l'Himalaya. Le trek devait durer quatre jours et son itineraire suivait le trace de la frontiere indo-nepalaise. Je suivis mon guide pour gravir les 1000 metres de denivellation qui devait nous mener a Tumling, petit village nepalais a 3000 metres d'altitude. Mon guide n'avait pas l'allure d'un guide de haute montagne: c'etait un sympa teenager aux pompes de skater qui passa son temps a me raconter ses exploits amoureux avec la gente feminine de Darjeeling.
Ce premier jour d'excursion nous mena a travers les magnifiques forets himalayennes que j'ai decrites auparavant. Je soufflais comme un boeuf sous mon sac a dos mais ca ne m'empecha pas d'apprecier le paysage. Les nuages qui caressaient la montagne lui donnaient un air lugubre et mysterieux. La foret etait sombre et denuee de toute trace de vie. Je n'entendais que les corbeaux qui croassaient et quelques esprits qui toussotaient. La mousse qui couvraient les arbres et les herbes qui pendaient des branches me faisaient penser a la Spanish moss qui donne cet air si particulier, melancolique et mysterieux, aux arbres de Savannah, au sud des Etats-Unis. Ainsi la foret himalayenne, traversee par la vapeur des nuages, prenait des allures mystiques. Je retins mon souffle. J'essayai d'user de mes yeux comme des papilles gustatives pour jouir au mieux du spectacle. C'est une chose que je fais parfois en voyage: j'essaie de me concentrer intensement sur ce que je vois pour bien l'imprimer dans mon cerveau, car je sais que je ne le verrai plus jamais. Je deguste avec mes yeux, comme on le fait avec la bouche quand on savoure quelque chose de succulent: un bon vin, une huitre ou un nichon. Je me souviens m'etre plonge dans mes yeux de la sorte a Macchu Picchu, a Huang Shan, sur le pont Charles a Prague. Je le fis aussi le lendemain en admirant Khangchendzonga.
Le village ou nous fimes halte etait du cote nepalais mais la frontiere indienne longeait les quelques maisons. Bien que je dormis du cote nepalais, je pris l'habitude d'aller faire mes besoins du cote indien. Peut-etre parce que je me disais que ce cote etait deja tout cochonne, de toute facon.
Dans l'auberge, quatre pompiers belges qui faisaient la meme excursion me proposerent du whisky ecossais pour me rechauffer. Un epais brouillard nous glacait les os. Bien que la temperature ne soit pas tres basse, l'air charge d'humidite nous donnait une sensation de froid intense. C'est une lecon que m'a appris un sec du plateau, qui me revela qu'un jour qu'il se leva a quatre heures pour attraper le transsiberien a Irkoutsk, le mercure affichait -35 degres mais il n'avait pas froid. Parce que l'air la-bas est totalement sec.
Apres avoir fini le whiskey, j'invitai les Belges a partager mon pinard pour celebrer le debut de la trentieme annee de ma vie. Feter son anniversaire avec quatre pompiers belges, dans un village nepalais, voila au moins quelque chose de bien absurde. C'est un peu du meme ordre que de feter Halloween avec des ornithologues tcheques dans une mosquee a Tombouctou. Mais les flamands de Gant etaient fort sympathiques. L'un d'eux raconta comment, lors de sa traversee de la Siberie en moto, il avait poursuivi a moto a travers une foret et jete a terre en pleine course deux voleurs qui lui avaient subtilise son casque. Une autre me raconta que c'etait son propre cousin qui avait invente le fameux siege ejectable pour helicoptere dont l'armee belge a equipe tous ses appareils.
Le pinard indien, etonnament, etait delicieux . Les Nepalais ne l'appreciaient pas mais nous proposerent de l'alcool de riz du Sikkim et du rum nepalais. Le meilleur fut la "biere" tibetaine: celle-ci consiste en des grains de millet mis a fermenter dns une grosse chope en bambou, dans laquelle on verse de l'eau chaude. Apres que l'eau se soit bien impregne d'alcool de millet, on sirote le liquide a l'aide d'une paille en bois. Yam.
Mais ce soir-la, l'air rarefie de l'altitude, qui ne parvenait pas a se frayer un chemin dans les corridors obstrues de mes sinus malades, ne me laissa pas dormir en paix. Je me mis a sniffer du sel pour degager mes voies nasales et tombai dans un demi-sommeil agite. Je revai que j'avais avale un gros epis de mais entier qui me torturait l'estomac. Je m'eveillai tout fievreux et nauseeux. En me levant a l'aube pour admirer Khangchendzonga, j'avouai aux sapeurs belges que je n'avais pas la force de poursuivre l'excursion. Mais quelle belle montagne, Om Nama Shiva! Pendant quelques instants, je reussis a transformer mes yeux en papilles a nouveau.
Puis le brouillard se leva et je passai la journee a attendre ma jeep avec le petit chat Shittie au coin de l'atre, essayant de contenir ma nausee. Je redescendis a Darjeeling dans une jeep bondee d'Indiens buvant, fumant et criant... La jeep s'arretait a chaque buvette au bord de la route et moi je ne comprenais pas quel plaisir ils tiraient a faire les cons dans le froid et le brouillard. J'avoue les avoir hai, et je me demandai pourquoi j'etais venu passer mon anniversaire dans ce froid que je deteste. Mais cette courte experience de froid et de grisaille me fis bien comprendre pourquoi j'ai fui le Novembre suisse. Je me rappelai comment je m'etais dit que je preferais passer l'automne colle a des toilettes turques avec une grosse diarrhee en Inde, plutot que de passer par la deprime d'un novembre a Zurich. Mais je ne suis meme pas passer par la: le lendemain, mes maux de ventre avaient disparu, et je gagnai Siliguri, la ou il fait chaud. Et mon paquet d'Immodium est toujours intact!
En redescendant a Siliguri, j'ai vu des types qui jouaient aux cartes sur les rails de chemin de fer. Et quand on s'est arrete pour boire un the, la patronne de la buvette coupait son fromage au hachoir a cote d'un petit chat qui dormait. Ca, c'est le genre de trucs pour lesquels j'apprecie l'Inde. Ca semble sortir d'un film de Kusturica.
Arrive a Siliguri, je m'installai dans un bon hotel pour me reposer et suivre les exploits de mon heros, Roger Federer, au Masters de Shanghai.
More Diu... C'est Marco qui a pris les photos... De haut en bas, l'eglise Sao Tome, squatte maintenant par des traveloques decadents. Jonathan et moi qui discutons de Kierkegaard au dejeuner. Bex, moi et Jonathan en calbuth dans notre chambre.
En parlant de Diu, j'ai appris la-bas un chouette jeu qui pourrait agrementer les soirees d'hiver pourries que vous vivez en Suisse (hihihahou).
Ca s'appelle le jeu des insultes.
Les joueurs, places autour d'une table, doivent l'un apres l'autre trouver le nom d'une personne celebre. Le prenom de la celebrite doit commencer par la meme lettre que le nom de famille de la celebrite precedente. Vaut comme celebrite toute personne qu'au moins trois joueurs connaissent. Si le prenom et le nom de famille de la celebrite commence par la meme lettre, on change de sens autour de la table.
Pendant qu'un joueur reflechit a sa celebrite, il doit boire a sa choppe de biere ou autre rum ou whiskey sans interruption jusqu'a ce qu'il est trouve un nom. Pendant ce temps, il est du devoir des autres joueurs de l'inciter a boire et de l'insulter, de le houspiller, de le rabaisser autant qu'ils le peuvent. Ca donne a peu pres ca: Come on drink, fucking bitch with glasses, drink, drink etc. (c'est l'exemple que nous a donne l'Irlandais qui nous a explique le jeu, en s'adressant a l'americaine lunetteuse a cote de lui)... Dans notre cas, comme il y avait des gens de toutes nations, les insulteurs utilisaient les stereotypes attribues a chaque pays pour insulter les joueurs. L'irlandais s'en est donne a coeur joie de rabaisser l'anglaise: fucking british, took our country, killed our men, raped our women...
Maintenant que je decris ce jeu je remarque qu'il est vraiment debile... mais sur le moment c'etait marrant... peut-etre etait-ce du aux vapeurs houblonneuses et cannabisiaques qui flottaient sur l'ile de Diu....
Les Indiens et les Chinois
Je n’ai pu m’empecher de remarquer des similarites entre ces deux peuples… Les Indiens, comme les Chinois, sont petits, nombreux, sales, malpolis et bruyants.
Cependant, les ressemblances s’arretent et je me dois de nuancer… Les deux peuples sont sales de facons differentes. Les Chinois font plutot dans le crachat jaunatre intempestif. Les Indiens preferent s’amuser amasser d’enormes quantites de dechets putrides au milieu des rues.
Ils sont aussi malpolis de differentes manieres. Les Chinois poussent plus violemment dans les queues et a l’entree des bus. Les Indiens, quant a eux ignorent les mots pardon, merci et au revoir. Mais question bruit, ce sont les Indiens qui emportent la palme grace a leurs klaxons… mais les Chinois sont certainement plus criards.
Et puis, bien sur, les cultures de ces deux pays sont totalement differentes… par exemple, les Indiens ne trempent pas dans une sorte de frenesie capitaliste comme les Chinois. Et ils ne bouffent pas tout ce qui bougent comme les Chinois (mais moi, je prefere de loin la cuisine chinoise a la cuisine indienne).
L'Atrocities Act
Pendant des siecles, les membres des basses castes n'ont pas ete traites comme des animaux, mais pire que des animaux. Dans le livre "L'equilibre du monde", de Rohinton Mistry, qui se veut un roman realiste de l'Inde moderne, trois hommes de basse caste sont punis par les hautes castes pour avoir ose pretendre voter aux elections provinciales. Ils sont pendus par les pieds et fouettes toute la journee sous le soleil brulant. Puis leurs bourreaux introduisent des charbons incandescents dans leur bouche qui font fondre leurs langues et leurs levres. Ils sont ensuite pendus, cette fois par le cou, sur la place du village et leurs familles entieres sont massacrees.
Je ne sais pas a quel point cette histoire reflete la realite... D'apres les articles qui paraissent dans les journaux, ce genre de crimes sont encore commis regulierement. Ils ne sont que rarement l'objet de rapports dans la presse ou de poursuites judiciaires. Dans tous les cas, le parlement a cru necessaire d'introduire une piece de droit penal protegant explicitement les basses castes contre les atrocites. Cet loi s'appelle l'Atrocities Act et n'a ete mis en vigueur qu'en 1989. Pour ceux que ca interesse, vous pouvez trouver cette loi a l'adresse ci-dessous (je pense en particulier a mes amis juristes!). Les articles 3 et 4 enumerent le genre de traitments qui etaient couramment infliges aux basses castes.
www.hrw.org/reports/1999/india/India994-16.htm
Pendant des siecles, les membres des basses castes n'ont pas ete traites comme des animaux, mais pire que des animaux. Dans le livre "L'equilibre du monde", de Rohinton Mistry, qui se veut un roman realiste de l'Inde moderne, trois hommes de basse caste sont punis par les hautes castes pour avoir ose pretendre voter aux elections provinciales. Ils sont pendus par les pieds et fouettes toute la journee sous le soleil brulant. Puis leurs bourreaux introduisent des charbons incandescents dans leur bouche qui font fondre leurs langues et leurs levres. Ils sont ensuite pendus, cette fois par le cou, sur la place du village et leurs familles entieres sont massacrees.
Je ne sais pas a quel point cette histoire reflete la realite... D'apres les articles qui paraissent dans les journaux, ce genre de crimes sont encore commis regulierement. Ils ne sont que rarement l'objet de rapports dans la presse ou de poursuites judiciaires. Dans tous les cas, le parlement a cru necessaire d'introduire une piece de droit penal protegant explicitement les basses castes contre les atrocites. Cet loi s'appelle l'Atrocities Act et n'a ete mis en vigueur qu'en 1989. Pour ceux que ca interesse, vous pouvez trouver cette loi a l'adresse ci-dessous (je pense en particulier a mes amis juristes!). Les articles 3 et 4 enumerent le genre de traitments qui etaient couramment infliges aux basses castes.
www.hrw.org/reports/1999/india/India994-16.htm
J'aime pas en Inde
1. les klaxons aigus des motos
2. les types qui te mentent pour t'arnaquer
3. les types qui te fixent betement
4. les types qui te parlent la bouche pleine de noix de betel
5. le sol des salles de bains est toujours mouille ca m'enerve
6. il y a que du cricket dans les pages sport des journaux
7. les culs-de-poules qui font mal aux vertebres
La noix de betel pousse sur de longs palmiers efiles. Les indiens s'en fourrent plein la gueule et ils arrivent pas a te parler et ils bavent et crachent une sorte de substance rougeatre degueulasse. Il parait que ca pete, la noix de betel. J'ai essaye mais je crois que je suis allergique, ca me brule tout le thorax quand j'en bouffe.
Pour qui n'a pas grandit dans ce pays, il est difficile de comprendre l'engouement des indiens pour le cricket. Il n'y a que ca partout: du cricket, du cricket, du fucking cricket. La preuve que tous ces moustachus s'en foutent des autres sports: aux derniers jeux olympiques, le milliard d'Indiens n'a obtenu qu'une miserable medaille de bronze! Pourtant, le cricket, ca parait incroyablement chiant... c'est comme du base-ball en beaucoup plus lent... les matchs peuvent durer jusqu'a cinq jours!!!
1. les klaxons aigus des motos
2. les types qui te mentent pour t'arnaquer
3. les types qui te fixent betement
4. les types qui te parlent la bouche pleine de noix de betel
5. le sol des salles de bains est toujours mouille ca m'enerve
6. il y a que du cricket dans les pages sport des journaux
7. les culs-de-poules qui font mal aux vertebres
La noix de betel pousse sur de longs palmiers efiles. Les indiens s'en fourrent plein la gueule et ils arrivent pas a te parler et ils bavent et crachent une sorte de substance rougeatre degueulasse. Il parait que ca pete, la noix de betel. J'ai essaye mais je crois que je suis allergique, ca me brule tout le thorax quand j'en bouffe.
Pour qui n'a pas grandit dans ce pays, il est difficile de comprendre l'engouement des indiens pour le cricket. Il n'y a que ca partout: du cricket, du cricket, du fucking cricket. La preuve que tous ces moustachus s'en foutent des autres sports: aux derniers jeux olympiques, le milliard d'Indiens n'a obtenu qu'une miserable medaille de bronze! Pourtant, le cricket, ca parait incroyablement chiant... c'est comme du base-ball en beaucoup plus lent... les matchs peuvent durer jusqu'a cinq jours!!!
J'aime en Inde
1. le tchai
2. les samosas et les pakoras
3. les vaches dans la rue
4. les images colorees de Shiva et de Ganesh
5. le lassi a la banane
6. Ahimsa
7. Diu
Le tchai est fait d'eau et de lait mis a bouillir avec du the. Il est generalement tres sucre et aromatise de gingembre, de cardamome, de clous de girofles et parfois de cannelle.
Les samosas et les pakoras sont des patisseries salees.
Il y a 100 millions de vaches en Inde.
Shiva est le Dieu tout-puissant destructeur au troisieme oeil sur le front et Ganesh est le Dieu-Elephant.
Le lassi est une sorte de frappe au yogurt qui me rappelle les "jugo de platano con leche" de la Bolivie, qu'a Coroico moi et Regis buvions dans nos hamacs accompagnes d'un ptit vin blanc chilien.
D'apres la doctrine hindoue appelee Ahimsa, l'homme doit s'efforcer de ne faire de mal a aucune creature vivante. Elle se traduit en particulier par le vegetarianisme (il y a certainement plus de vegetariens en Inde que dans le reste du monde reuni) ou par la doctrine de non-violence du Mahatma Ghandi, qui a sa tronche imprimee sur tous les billets de banque indiens. Ahimsa tire son origine des religions bouddhiste et jain apparue au 6e et 7e siecle avant Jesus-Christ (certains elements du bouddhisme ont ete incorpores a l'Hindouisme; le Bouddha lui-meme est une divinite hindoue, incarnation de Vishnu). Les moines jains poussent Ahimsa a son extreme: en avancant, ils balaie constamment le sol devant eux pour eviter de blesser de petites creatures qu'ils pourraient ne pas apercevoir.
1. le tchai
2. les samosas et les pakoras
3. les vaches dans la rue
4. les images colorees de Shiva et de Ganesh
5. le lassi a la banane
6. Ahimsa
7. Diu
Le tchai est fait d'eau et de lait mis a bouillir avec du the. Il est generalement tres sucre et aromatise de gingembre, de cardamome, de clous de girofles et parfois de cannelle.
Les samosas et les pakoras sont des patisseries salees.
Il y a 100 millions de vaches en Inde.
Shiva est le Dieu tout-puissant destructeur au troisieme oeil sur le front et Ganesh est le Dieu-Elephant.
Le lassi est une sorte de frappe au yogurt qui me rappelle les "jugo de platano con leche" de la Bolivie, qu'a Coroico moi et Regis buvions dans nos hamacs accompagnes d'un ptit vin blanc chilien.
D'apres la doctrine hindoue appelee Ahimsa, l'homme doit s'efforcer de ne faire de mal a aucune creature vivante. Elle se traduit en particulier par le vegetarianisme (il y a certainement plus de vegetariens en Inde que dans le reste du monde reuni) ou par la doctrine de non-violence du Mahatma Ghandi, qui a sa tronche imprimee sur tous les billets de banque indiens. Ahimsa tire son origine des religions bouddhiste et jain apparue au 6e et 7e siecle avant Jesus-Christ (certains elements du bouddhisme ont ete incorpores a l'Hindouisme; le Bouddha lui-meme est une divinite hindoue, incarnation de Vishnu). Les moines jains poussent Ahimsa a son extreme: en avancant, ils balaie constamment le sol devant eux pour eviter de blesser de petites creatures qu'ils pourraient ne pas apercevoir.
25 novembre 2005
Hier soir, j'ai fini de lire 100 ans de solitude. Je crois que Gabriel Garcia Marquez a rejoint Italo Calvino parmi les ecrivains meritant mon admiration eternelle. Ce bouquin est fascinant. Plein de vie, de folie et de fatalisme.
Je me demande avec qui et contre quel livre je vais echanger 100 ans de solitude. Eh oui, c'est l'un des charmes de la communaute des backpackers: au lieu de ranger les livres qu'on a termine sur une etagere, on les echange ou on les offre aux gens qu'on rencontre. On herite ainsi de bons livres qui ont le charme d'avoir ete deja lu et d'avoir deja voyage. Le livre a la mode chez les traveloques indiens actuellement est Life of Pi de Yann Martel. Pi est un jeune Indien qui, passione de religion, se convertit a l'Islam, a l'Hindouisme et au Christianisme, ne pouvant se decider a se livrer a un seul Dieu. Tous les jours, il sonne la cloche pour Shiva, s'agenouille devant le Christ et se prosterne en direction de La Mecque. Son pere, directeur du zoo de Pondicherry, decide un jour d'emigrer au Canada en embarque tous ses animaux. Le bateau coule et Pi se retrouve seul a bord du canot de sauvetage avec Richard Parker, le tigre du Bengale. Pi engage alors toute son imagination et son audace pour survivre au milieu du Pacifique avec pour seul compagnon un felin mangeur d'hommes.
J'ai echange Life of Pi contre une copie photocopiee de First they killed my father, temoignage d'une jeune fille qui a vecu la tyrannie et les massacres des Khmers Rouges au Cambodge.
Je me demande avec qui et contre quel livre je vais echanger 100 ans de solitude. Eh oui, c'est l'un des charmes de la communaute des backpackers: au lieu de ranger les livres qu'on a termine sur une etagere, on les echange ou on les offre aux gens qu'on rencontre. On herite ainsi de bons livres qui ont le charme d'avoir ete deja lu et d'avoir deja voyage. Le livre a la mode chez les traveloques indiens actuellement est Life of Pi de Yann Martel. Pi est un jeune Indien qui, passione de religion, se convertit a l'Islam, a l'Hindouisme et au Christianisme, ne pouvant se decider a se livrer a un seul Dieu. Tous les jours, il sonne la cloche pour Shiva, s'agenouille devant le Christ et se prosterne en direction de La Mecque. Son pere, directeur du zoo de Pondicherry, decide un jour d'emigrer au Canada en embarque tous ses animaux. Le bateau coule et Pi se retrouve seul a bord du canot de sauvetage avec Richard Parker, le tigre du Bengale. Pi engage alors toute son imagination et son audace pour survivre au milieu du Pacifique avec pour seul compagnon un felin mangeur d'hommes.
J'ai echange Life of Pi contre une copie photocopiee de First they killed my father, temoignage d'une jeune fille qui a vecu la tyrannie et les massacres des Khmers Rouges au Cambodge.
15 novembre 2005
Darjeeling!
Darjeeling, Darjeeling, le nom meme est magique, il coule dans mes conduits auditifs comme un ruisseau himalayen sur de ronds galets. A Darjeeling, le the mele son amertume a une saveur particuliere, un doux parfum que je n'avais jamais goute auparavant. Ah, Darjeeling, quel bel endroit pour passer les derniers jours de ma jeunesse. Quand j'aurai 29 ans, dans 2 jours, tout sera fini.
Darjeeling, Darjeeling, le nom meme est magique, il coule dans mes conduits auditifs comme un ruisseau himalayen sur de ronds galets. A Darjeeling, le the mele son amertume a une saveur particuliere, un doux parfum que je n'avais jamais goute auparavant. Ah, Darjeeling, quel bel endroit pour passer les derniers jours de ma jeunesse. Quand j'aurai 29 ans, dans 2 jours, tout sera fini.
Les transexuels en Inde
En Inde, les transexuels forment une caste particuliere et sont acceptes en tant que tels depuis des milliers d'annees. On les croise souvent dans les trains. Ce sont generalement de beaux mecs de 20-30 ans, meticuleusement maquilles, les levres rouge vif, habilles de beaux saris colores. Ils mendient et ca porte bonheur de leur donner de l'argent, qu'on dit. Malheureusement, ils deviennent aggressifs si on ne leur donne rien. Leur apparence quelque peu malsaine les rend effrayants lorsqu'ils se mettent a crier en Hindi. Moi-meme, ils m'ont deja maudit moultes fois.
En Inde, les transexuels forment une caste particuliere et sont acceptes en tant que tels depuis des milliers d'annees. On les croise souvent dans les trains. Ce sont generalement de beaux mecs de 20-30 ans, meticuleusement maquilles, les levres rouge vif, habilles de beaux saris colores. Ils mendient et ca porte bonheur de leur donner de l'argent, qu'on dit. Malheureusement, ils deviennent aggressifs si on ne leur donne rien. Leur apparence quelque peu malsaine les rend effrayants lorsqu'ils se mettent a crier en Hindi. Moi-meme, ils m'ont deja maudit moultes fois.
10 novembre 2005
Varanasi
Varanasi, qui s'appelle aussi Benares ou Kashi, est la cite la plus sainte de l'Hindouisme. Ah, c'est une ville qui me plait! La merveilleuse vieille ville est faite de rues etroites et sinueuses qui abondent de petits magasins de tailleurs, de boutiques a samosas et pakoras (patisseries salees), de blanchisseries, de boutiques de cerfs-volants (les cerfs-volants sont extremement populaires a Varanasi, leurs cadavres sont accrochees partout, au fils electriques et aux echafaudages), de joailleries et d'epiceries, d'etalages de legumes et de fruits. C'est vrai que Varanasi est aussi une ville degueulasse, certainement la plus crade qu'il m'est ete donne de voir. Il y a beacoup de vaches et elles cochonnent tout. Il y a meme des troupeaux de buffles qui viennent se rafraichir dans le Gange et qui traversent ensuite la ville, accompagnes par leurs bergers. De temps et temps, une vache pete les plombs et il y a un accident. Et puis Varanasi est plein d'arnaqueurs de tous poils. Les silks shops sont generalement des pieges a touristes, et je me suis fait propose de l'herbe et de l'opium au moins 15 fois aujourd'hui... Meme a Pushkar, autre ville sainte, il n'y avait pas autant de dealers. Apparemment, plus la ville est sainte, plus il y a de touristes, et plus il y a de drogues. Quelques touristes disparaissent regulierement a Varanasi, engloutis par le Gange ou par quelques sombres escrocs.
L'attraction de Varanasi, c'est les ghats sur les rives du Gange. Les ghats sont des lieux de culte ou on pratique la puja, la priere, on l'on se purifie dans les eaux du Gange et ou l'on incinere les corps. Differents ghats sont dedies a differents Dieux et ont ete construits par differents maharadjas. Il prennent la forme de vastes plates-formes et d'escaliers menant a la riviere. Il sont le lieu d'une activite incessante: pujas, musique, danses, rites des toutes sortes que je ne comprends pas. Des hospices se trouvent au bord de la sainte riviere ou les gens viennent mourir. Selon la tradition hindoue, mourir a Varanasi interrompt le cycle des naissances et permet d'atteindre la moksha, la liberation. L'incineration au bord du Gange est aussi une benediction. La preparation des cadavres et l'incineration est accomplie par une caste d'intouchables, les doms. On peut assister a ces incinerations sur de grands buchers de bois. Mais les corps d'enfants en bas age et de femmes einceintes, ainsi que d'autres categories de personnes, ne sont pas brules mais jetes dans le fleuve lestes de pierres.
Les rives de la riviere sont frequentes par les babas, plus ou moins gentils et plus ou moins honnetes. On appelle babas des hommes saints des castes superieures qui sont attitres au culte des divinites hindoues. Ce soir, j'ai rencontre un gentil baba. Pendant l'apres-midi, j'avais remarque un type un peu acrobate qui peignait le temple de Shiva en rose, sur l'un des ghat. Alors que je trainais sur le meme ghat ce soir, le meme type est venu s'asseoir a cote de moi et je lui offert un chai. C'etait chouette de boire le chai: il est servi dans des petits bols en terre cuite que tu casses sur la pierre quand tu termines ta boisson! Mon baba etait donc prepose a la peinturlure du temple et etait en consequence tout couvert de rose. Son regard respirait une certaine folie, mais une vigoureuse et saine folie qui ne m'effraya pas. Il etait arrive a 8 ans a Varanasi apres que sa famille entiere se fit tuer dans les affrontements entre musulmans et hindous lors de l'independence (l'independance de l'Inde et la partition d'avec le Pakistan et le Bangladesh fut extremement douloureuses. Des millions de personnes furent deportees et des milliers massacrees). Il me fit une lecon sur les gentils et les mechants babas, en me montrant du doigts les types barbus mi-nus qui passaient: good baba, bad baba, very good baba, cheating baba... En effet, nombreux sont les pseudo-pretres escrocs, et pour moi ils ont tous l'air pareil... Mon pote, par contre, semblait avoir l'oeil pour reconnaitre les filous. Il m'accompagna au Gange pour que j'y depose la bougie que j'avais achetee, deposee dans un petit bateau de feuilles nouees. Je me jetai de l'eau du fleuve sacre sur la tronche et prononcai: Om Nama Shiva et mon barbu rose se revela effectivement etre un bon baba, parce qu'il ne me demanda pas d'argent pour ses services religieux, ce qui me stupefia. Je vais aller l'observer peindre son temple demain.
Varanasi, qui s'appelle aussi Benares ou Kashi, est la cite la plus sainte de l'Hindouisme. Ah, c'est une ville qui me plait! La merveilleuse vieille ville est faite de rues etroites et sinueuses qui abondent de petits magasins de tailleurs, de boutiques a samosas et pakoras (patisseries salees), de blanchisseries, de boutiques de cerfs-volants (les cerfs-volants sont extremement populaires a Varanasi, leurs cadavres sont accrochees partout, au fils electriques et aux echafaudages), de joailleries et d'epiceries, d'etalages de legumes et de fruits. C'est vrai que Varanasi est aussi une ville degueulasse, certainement la plus crade qu'il m'est ete donne de voir. Il y a beacoup de vaches et elles cochonnent tout. Il y a meme des troupeaux de buffles qui viennent se rafraichir dans le Gange et qui traversent ensuite la ville, accompagnes par leurs bergers. De temps et temps, une vache pete les plombs et il y a un accident. Et puis Varanasi est plein d'arnaqueurs de tous poils. Les silks shops sont generalement des pieges a touristes, et je me suis fait propose de l'herbe et de l'opium au moins 15 fois aujourd'hui... Meme a Pushkar, autre ville sainte, il n'y avait pas autant de dealers. Apparemment, plus la ville est sainte, plus il y a de touristes, et plus il y a de drogues. Quelques touristes disparaissent regulierement a Varanasi, engloutis par le Gange ou par quelques sombres escrocs.
L'attraction de Varanasi, c'est les ghats sur les rives du Gange. Les ghats sont des lieux de culte ou on pratique la puja, la priere, on l'on se purifie dans les eaux du Gange et ou l'on incinere les corps. Differents ghats sont dedies a differents Dieux et ont ete construits par differents maharadjas. Il prennent la forme de vastes plates-formes et d'escaliers menant a la riviere. Il sont le lieu d'une activite incessante: pujas, musique, danses, rites des toutes sortes que je ne comprends pas. Des hospices se trouvent au bord de la sainte riviere ou les gens viennent mourir. Selon la tradition hindoue, mourir a Varanasi interrompt le cycle des naissances et permet d'atteindre la moksha, la liberation. L'incineration au bord du Gange est aussi une benediction. La preparation des cadavres et l'incineration est accomplie par une caste d'intouchables, les doms. On peut assister a ces incinerations sur de grands buchers de bois. Mais les corps d'enfants en bas age et de femmes einceintes, ainsi que d'autres categories de personnes, ne sont pas brules mais jetes dans le fleuve lestes de pierres.
Les rives de la riviere sont frequentes par les babas, plus ou moins gentils et plus ou moins honnetes. On appelle babas des hommes saints des castes superieures qui sont attitres au culte des divinites hindoues. Ce soir, j'ai rencontre un gentil baba. Pendant l'apres-midi, j'avais remarque un type un peu acrobate qui peignait le temple de Shiva en rose, sur l'un des ghat. Alors que je trainais sur le meme ghat ce soir, le meme type est venu s'asseoir a cote de moi et je lui offert un chai. C'etait chouette de boire le chai: il est servi dans des petits bols en terre cuite que tu casses sur la pierre quand tu termines ta boisson! Mon baba etait donc prepose a la peinturlure du temple et etait en consequence tout couvert de rose. Son regard respirait une certaine folie, mais une vigoureuse et saine folie qui ne m'effraya pas. Il etait arrive a 8 ans a Varanasi apres que sa famille entiere se fit tuer dans les affrontements entre musulmans et hindous lors de l'independence (l'independance de l'Inde et la partition d'avec le Pakistan et le Bangladesh fut extremement douloureuses. Des millions de personnes furent deportees et des milliers massacrees). Il me fit une lecon sur les gentils et les mechants babas, en me montrant du doigts les types barbus mi-nus qui passaient: good baba, bad baba, very good baba, cheating baba... En effet, nombreux sont les pseudo-pretres escrocs, et pour moi ils ont tous l'air pareil... Mon pote, par contre, semblait avoir l'oeil pour reconnaitre les filous. Il m'accompagna au Gange pour que j'y depose la bougie que j'avais achetee, deposee dans un petit bateau de feuilles nouees. Je me jetai de l'eau du fleuve sacre sur la tronche et prononcai: Om Nama Shiva et mon barbu rose se revela effectivement etre un bon baba, parce qu'il ne me demanda pas d'argent pour ses services religieux, ce qui me stupefia. Je vais aller l'observer peindre son temple demain.
08 novembre 2005
Voyager en Inde
Voyager 46 heures en bus et en train en trois jours, c'etait une putain d'experience, que je ne regrette pas, bien qu'elle m'ait coute quelques jours de fatigue et une beau refroidissement.
De Diu, tout au sud du Gujarat, province qui forme la petite pointe de terre juste en haut a gauche du grand V du subcontinent indien, a Varanas, il y avait 1500 kilometres a parcourir pour retrouver mon amie d'enfance, Sephalie et ses deux hommes. Pfr, j'ai cru que je n'allais jamais y arriver. Le parcours a ete rendu difficile par le fait que pendant la periode de Diwali, le nouvel-an indien, tous les trains sont pleins. Arrive a Ahmedabad, apres dix heures de bus de nuit, j'ai decide de couper a travers le subcontinent en bus, plutot que d'attendre un train avec une hypothetique reservation. Mais les bus indiens sont une malediction, rouilles et completement denues de suspension, ils detruisent les vertebres les plus coriaces, se faisant complices des milliards de culs-de-poule qui jalonnent les nationales. Ils sont extremement lents... rarement plus que 60 kilometres a l'heure. La journee, on souffre du soleil brulant et de la mauvaise sono qui te tapent sur la gueule... La nuit, impossible de dormir quand on decolle literalement de sa couchette...
Les trains sont beaucoup plus agreables. Ils sont vieux jeux, attachants. Les couchettes sont toujours bleues et les fenetres sont petites et barrees de grosses barres de fer. Les indiens sur les banquettes avoisinantes sont toujours avides de faire la conversation avec vous. Comme ces dix teenagers, dans le train de Jaipur a Ranthambore, au Rajasthan, qui me fixerent de leurs yeux curieux pendant une heure avant de me demander whereareyoufrom? Apres quelques questions preliminaires, ils revelerent leur veritable interet: comment on fait pour avoir une copine? Quels sont les trucs pour seduire? Comment on devient sexy? Je subis un veritable interrogatoire. Dix paires d'yeux rayonnant de curiosite me fixaient lorsque j''essayai de leur donner quelques trucs de vieux roubard a deux balles pour seduire les filles: sentir bon, etre patient, ne pas montrer trop de zele a seduire la fille... Mais il ne voulaient pas comprendre qu'il n'y avait pas de trucs sinon ca se saurait, qu'ils devaient faire leur chemin de croix comme nous tous pauvres types. Bref, on fait des rencontres geniales en train, des types qui n'en veulent pas qu'a ton pognon comme dans la plupart des endroits touristiques.
Mais pour mon trajet de Bhopal a Varanasi, j'aurais voulu miser sur le confort. Mais ce fut l'echec. Les trois premieres heures du voyage, je les fis en troisieme classe, et ce fut oppressant. Je n'avais jamais vu un train aussi bonde. Les passagers qui voulaient descendre devaient se battre avec ceux qui montaient. On est tellement serre qu'on ne peut faire le moindre mouvement. On sait pas ou foutre ses pieds tellement il y a des types partout. L'extreme promiscuite est certainement l'un des elements les plus difficiles a supporter pour le voyageur occidental en Asie en general, et en Inde en particulier. Ici les gens sont habitues a etre colles les uns aux autres, a ne disposer d'une sphere personnelle que tres reduite. C'est particulierement prononce dans les transports publics. Ce voyage en fut une belle demonstration.
Pour les dix-huit heures restantes, je ne pus obtenir une reservation et montai dans un compartiment second sleeper en esperant pouvoir reserver une couchette une fois dans le train. Ce ne fut pas. Je me vis reduit a dormir dans le couloir, pres des toilettes. Dans ces circonstances, on prend son mal en patience et on essaie de s'installer du mieux qu'on peut.... Je m'enfilai dans mon fidele Butterfly H30 et m'allongeai sur mon sac a dos, ecrasant les bouquins, les vetements et les medics qui s'y trouvaient. Je pris mon sac comme matelas en partie par peur de me le faire voler... quand on voyage seul, on ne peut jamais laisser ses affaires sans surveillance. Malgre l'air froid qui soufflait par les portes mal isolees et les odeurs des latrines, je reussis a m'assoupir. Mais mon repos fut interrompu regulierement par les voyageurs qui montaient et descendaient. Je dormis deux ou trois heures de temps. A cinq heures, les passagers se leverent et je fus heureux de voir monter les petits vendeurs de chai. La boisson chaude et sucree me fit du bien et je me mis a observer le va-et-viens vers les toilettes. Les indiens aiment bien se racler la gorge et cracher le matin, mais pas autant que les chinois. Chose etonnante, ils disposent d'un objet etrange, en metal, en forme de V pour se nettoyer la langue le matin. Et puis, j'ai eu droit a une nouvelle demonstration de la flemmardise legendaire des males indiens. A cinq heures, des femmes se mirent a monter et empiler des dizaines de paquets de bois dans le train, certainement pour les vendre dans la bourgade suivante. Les paquets etaient lourds et volumineux mais le travail entier fut accompli par de jeunes filles freles qui portaient le bois sur leurs tetes. Il y avait bien des hommes avec eux, mais ceux-ci se contenterent de leur donner des instructions. En Inde, ce sont les femmes qui bossent, ce n'est pas la premiere fois que je le constate... Elles cuisinent les chapatis et torchent les gosses. Les hommes fument des beedis et discutaillent. Aux mariages, ce sont eux qui dansent et s'amusent, les femmes les regardent...
Je suis arrive a Varanasi epuise. Le rhum que j'ai attrape dans le train me poursuit toujours. En fait il s'est mue en une mechante sinusite que j'essaye de tuer en sniffant du sel.
Encore une petite anecdote sur un voyage en bus. Avant tout voyage dans un vehicule, je me vide la vessie. Cela m'a ete inculque systematiquement par mon cher pere dont c'etait une majeur preoccupation depuis que la vessie d'un de ses potes avaient eclate dans un accident de voiture. Mais ce jour-la, a Jaisalmer, j'avais consomme des litres de flotte parce que j'avais attrape une sorte de fievre du desert due aux longues heures sur mon chameau. Ainsi, apres une heure de parcours a peine, cette pression dans le bas-ventre bien connue se fit sentir. J'esperai un arret du bus dans les plus courts delais, mais le chauffeur poursuivait sa route impunement. Apres trois heures, il n'avait toujours pas fait d'arret, et il semblait qu'il ne stopperait pas jusqu'au lendemain matin. J'etais assez glauque et je n'avais pas la moindre envie d'aller lui demander de s'arreter pour mon pipi. Comme je n'avais rien de mieux a foutre, et que mon imagination divaguait en observant les sombres paysages qui defilaient devant mes yeux fievreux, je me mis a speculer sur un moyen de vider ma vessie. Je dus vite renoncer a me vider en laissant pendouiller mon instrument par la fenetre, le dit instrument ne disposant pas de la longueur necessaire. La solution ne semblait pouvoir venir que de l'objet responsable de mes tourments: la bouteille en pet qui avait contenu le liquide qui maintenant me torturait. Ma position dans le bus etait strategiquement ideale pour un tel projet: J'etais couche seul sur la couchette tout a l'arriere au coin du bus, au-dessus des sieges qui jalonnaient la partie inferieure. Mais l'entreprise etait tout de meme risquee. Les rideaux qui me cachaient aux yeux des autres voyageurs fermaient mal et etaient agites par le vent... A tout moment, le controleur ou un autre type indesirable pouvait apparaitre, devoilant mon crime aux yeux du monde. Et puis, le bus bringueballait sur les culs-de-poule, les depassements intempestifs faisaient pencher le bus, ce qui risquait de renverser le liquide indesirable sur la couchette... Et comment se debarasser de l'urine? Ce probleme me parut insoluble, surtout lorsque je constatai que mon engin presentait un diametre trop important pour l'enfiler dans l'embouchure de la bouteille. Il fallait donc rendre l'ouverture plus large, mais alors, comment fermer la bouteille? Evidemment, ce souci etait sans fondement: il me suffisait de deverser le liquide par la fenetre, elle se deverserait sur le pare-brise du prochain camion.
Je me mis alors a decouper fievreusement la bouteille de mon canif, et quelques minutes plus tard, je pus mettre mon projet a execution. Tout se passa bien. Je dus meme repeter l'observation: il est fascinant de constater que la vessie humaine peut contenir pres de deux litres! Je peux en temoigner. Merci pour votre attention.
Voyager 46 heures en bus et en train en trois jours, c'etait une putain d'experience, que je ne regrette pas, bien qu'elle m'ait coute quelques jours de fatigue et une beau refroidissement.
De Diu, tout au sud du Gujarat, province qui forme la petite pointe de terre juste en haut a gauche du grand V du subcontinent indien, a Varanas, il y avait 1500 kilometres a parcourir pour retrouver mon amie d'enfance, Sephalie et ses deux hommes. Pfr, j'ai cru que je n'allais jamais y arriver. Le parcours a ete rendu difficile par le fait que pendant la periode de Diwali, le nouvel-an indien, tous les trains sont pleins. Arrive a Ahmedabad, apres dix heures de bus de nuit, j'ai decide de couper a travers le subcontinent en bus, plutot que d'attendre un train avec une hypothetique reservation. Mais les bus indiens sont une malediction, rouilles et completement denues de suspension, ils detruisent les vertebres les plus coriaces, se faisant complices des milliards de culs-de-poule qui jalonnent les nationales. Ils sont extremement lents... rarement plus que 60 kilometres a l'heure. La journee, on souffre du soleil brulant et de la mauvaise sono qui te tapent sur la gueule... La nuit, impossible de dormir quand on decolle literalement de sa couchette...
Les trains sont beaucoup plus agreables. Ils sont vieux jeux, attachants. Les couchettes sont toujours bleues et les fenetres sont petites et barrees de grosses barres de fer. Les indiens sur les banquettes avoisinantes sont toujours avides de faire la conversation avec vous. Comme ces dix teenagers, dans le train de Jaipur a Ranthambore, au Rajasthan, qui me fixerent de leurs yeux curieux pendant une heure avant de me demander whereareyoufrom? Apres quelques questions preliminaires, ils revelerent leur veritable interet: comment on fait pour avoir une copine? Quels sont les trucs pour seduire? Comment on devient sexy? Je subis un veritable interrogatoire. Dix paires d'yeux rayonnant de curiosite me fixaient lorsque j''essayai de leur donner quelques trucs de vieux roubard a deux balles pour seduire les filles: sentir bon, etre patient, ne pas montrer trop de zele a seduire la fille... Mais il ne voulaient pas comprendre qu'il n'y avait pas de trucs sinon ca se saurait, qu'ils devaient faire leur chemin de croix comme nous tous pauvres types. Bref, on fait des rencontres geniales en train, des types qui n'en veulent pas qu'a ton pognon comme dans la plupart des endroits touristiques.
Mais pour mon trajet de Bhopal a Varanasi, j'aurais voulu miser sur le confort. Mais ce fut l'echec. Les trois premieres heures du voyage, je les fis en troisieme classe, et ce fut oppressant. Je n'avais jamais vu un train aussi bonde. Les passagers qui voulaient descendre devaient se battre avec ceux qui montaient. On est tellement serre qu'on ne peut faire le moindre mouvement. On sait pas ou foutre ses pieds tellement il y a des types partout. L'extreme promiscuite est certainement l'un des elements les plus difficiles a supporter pour le voyageur occidental en Asie en general, et en Inde en particulier. Ici les gens sont habitues a etre colles les uns aux autres, a ne disposer d'une sphere personnelle que tres reduite. C'est particulierement prononce dans les transports publics. Ce voyage en fut une belle demonstration.
Pour les dix-huit heures restantes, je ne pus obtenir une reservation et montai dans un compartiment second sleeper en esperant pouvoir reserver une couchette une fois dans le train. Ce ne fut pas. Je me vis reduit a dormir dans le couloir, pres des toilettes. Dans ces circonstances, on prend son mal en patience et on essaie de s'installer du mieux qu'on peut.... Je m'enfilai dans mon fidele Butterfly H30 et m'allongeai sur mon sac a dos, ecrasant les bouquins, les vetements et les medics qui s'y trouvaient. Je pris mon sac comme matelas en partie par peur de me le faire voler... quand on voyage seul, on ne peut jamais laisser ses affaires sans surveillance. Malgre l'air froid qui soufflait par les portes mal isolees et les odeurs des latrines, je reussis a m'assoupir. Mais mon repos fut interrompu regulierement par les voyageurs qui montaient et descendaient. Je dormis deux ou trois heures de temps. A cinq heures, les passagers se leverent et je fus heureux de voir monter les petits vendeurs de chai. La boisson chaude et sucree me fit du bien et je me mis a observer le va-et-viens vers les toilettes. Les indiens aiment bien se racler la gorge et cracher le matin, mais pas autant que les chinois. Chose etonnante, ils disposent d'un objet etrange, en metal, en forme de V pour se nettoyer la langue le matin. Et puis, j'ai eu droit a une nouvelle demonstration de la flemmardise legendaire des males indiens. A cinq heures, des femmes se mirent a monter et empiler des dizaines de paquets de bois dans le train, certainement pour les vendre dans la bourgade suivante. Les paquets etaient lourds et volumineux mais le travail entier fut accompli par de jeunes filles freles qui portaient le bois sur leurs tetes. Il y avait bien des hommes avec eux, mais ceux-ci se contenterent de leur donner des instructions. En Inde, ce sont les femmes qui bossent, ce n'est pas la premiere fois que je le constate... Elles cuisinent les chapatis et torchent les gosses. Les hommes fument des beedis et discutaillent. Aux mariages, ce sont eux qui dansent et s'amusent, les femmes les regardent...
Je suis arrive a Varanasi epuise. Le rhum que j'ai attrape dans le train me poursuit toujours. En fait il s'est mue en une mechante sinusite que j'essaye de tuer en sniffant du sel.
Encore une petite anecdote sur un voyage en bus. Avant tout voyage dans un vehicule, je me vide la vessie. Cela m'a ete inculque systematiquement par mon cher pere dont c'etait une majeur preoccupation depuis que la vessie d'un de ses potes avaient eclate dans un accident de voiture. Mais ce jour-la, a Jaisalmer, j'avais consomme des litres de flotte parce que j'avais attrape une sorte de fievre du desert due aux longues heures sur mon chameau. Ainsi, apres une heure de parcours a peine, cette pression dans le bas-ventre bien connue se fit sentir. J'esperai un arret du bus dans les plus courts delais, mais le chauffeur poursuivait sa route impunement. Apres trois heures, il n'avait toujours pas fait d'arret, et il semblait qu'il ne stopperait pas jusqu'au lendemain matin. J'etais assez glauque et je n'avais pas la moindre envie d'aller lui demander de s'arreter pour mon pipi. Comme je n'avais rien de mieux a foutre, et que mon imagination divaguait en observant les sombres paysages qui defilaient devant mes yeux fievreux, je me mis a speculer sur un moyen de vider ma vessie. Je dus vite renoncer a me vider en laissant pendouiller mon instrument par la fenetre, le dit instrument ne disposant pas de la longueur necessaire. La solution ne semblait pouvoir venir que de l'objet responsable de mes tourments: la bouteille en pet qui avait contenu le liquide qui maintenant me torturait. Ma position dans le bus etait strategiquement ideale pour un tel projet: J'etais couche seul sur la couchette tout a l'arriere au coin du bus, au-dessus des sieges qui jalonnaient la partie inferieure. Mais l'entreprise etait tout de meme risquee. Les rideaux qui me cachaient aux yeux des autres voyageurs fermaient mal et etaient agites par le vent... A tout moment, le controleur ou un autre type indesirable pouvait apparaitre, devoilant mon crime aux yeux du monde. Et puis, le bus bringueballait sur les culs-de-poule, les depassements intempestifs faisaient pencher le bus, ce qui risquait de renverser le liquide indesirable sur la couchette... Et comment se debarasser de l'urine? Ce probleme me parut insoluble, surtout lorsque je constatai que mon engin presentait un diametre trop important pour l'enfiler dans l'embouchure de la bouteille. Il fallait donc rendre l'ouverture plus large, mais alors, comment fermer la bouteille? Evidemment, ce souci etait sans fondement: il me suffisait de deverser le liquide par la fenetre, elle se deverserait sur le pare-brise du prochain camion.
Je me mis alors a decouper fievreusement la bouteille de mon canif, et quelques minutes plus tard, je pus mettre mon projet a execution. Tout se passa bien. Je dus meme repeter l'observation: il est fascinant de constater que la vessie humaine peut contenir pres de deux litres! Je peux en temoigner. Merci pour votre attention.
La pauvrete
La pauvrete est omnipresente en Inde. Les pauvres bougres, miserables heres en haillons, enfants sales aux vetements dechires sont legion. J'ai deja vu beaucoup de pauvrete en Bolivie et en Chine, c'est vrai... mais ce n'est pas comparable avec l'Inde. Ici, la misere est a portee de main et la mort, son compagnon, n'a pas la decence de se cacher. Les bidonvilles abondent. Les mendiants amputes, deformes, aveugles, malades ne vous laissent pas de repit.
Pourtant, ca ne me choque pas. J'ai de la peine a m'expliquer pourquoi...
La pauvrete, quand je la vois et quand j'y reflechis, me fait comprendre a quel point ces gens, beaucoup de gens, souffrent. Comment toute tentative pour eux de sortir de leur condition est desesperee, vouee a l'echec. Combien j'ai de la chance d'etre ne dans la paisible et riche Suisse, qui me donne la securite materielle. Mais toutes ces reflexions sont purement intellectuelles. La vue de la misere n'eveillent pas en moi de tristesse, de pitie, de compassion. Mon coeur reste presque insensible, je n'ai que peu de sentiments...
Je m'interroge sur les raisons de cette insensibilite. Est-ce la routine, de voir cette pauvrete tous les jours? Une sorte de fatalisme, le sentiment que je ne peux rien faire pour ces gens? Ou l'egoisme du touriste qui vit la pauvrete comme un spectacle qui ne l'implique pas? C'est certainement tout ca, et c'est triste. Mais je crois qu'il y a quelque chose d'autre: je ne peux ressentir de compassion pour des gens que je ne connais pas. Les choses changent quand je me mets a les connaitre. La vue des ventres bombes des petits enfants de mon chamelier, dans le desert, m'a vraiment fait mal au coeur. Cela m'a degoute qu'il depense tellement d'argent en biere, alors que ses enfants etaient manifestement mal nourris. Le petit garcon des gitanes que j'ai rencontre a Pushkar, qui souffrait d'une infection a l'oreille, m'a egalement fait pitie. Alors peut-etre que je ne suis pas une brute insensible, apres tout.
Enfin... Si Jesus, Vishnu ou Allah existent, ou l'un d'entre eux, j'espere qu'ils viendront en aide a tous les misereux de ce pays....
La pauvrete est omnipresente en Inde. Les pauvres bougres, miserables heres en haillons, enfants sales aux vetements dechires sont legion. J'ai deja vu beaucoup de pauvrete en Bolivie et en Chine, c'est vrai... mais ce n'est pas comparable avec l'Inde. Ici, la misere est a portee de main et la mort, son compagnon, n'a pas la decence de se cacher. Les bidonvilles abondent. Les mendiants amputes, deformes, aveugles, malades ne vous laissent pas de repit.
Pourtant, ca ne me choque pas. J'ai de la peine a m'expliquer pourquoi...
La pauvrete, quand je la vois et quand j'y reflechis, me fait comprendre a quel point ces gens, beaucoup de gens, souffrent. Comment toute tentative pour eux de sortir de leur condition est desesperee, vouee a l'echec. Combien j'ai de la chance d'etre ne dans la paisible et riche Suisse, qui me donne la securite materielle. Mais toutes ces reflexions sont purement intellectuelles. La vue de la misere n'eveillent pas en moi de tristesse, de pitie, de compassion. Mon coeur reste presque insensible, je n'ai que peu de sentiments...
Je m'interroge sur les raisons de cette insensibilite. Est-ce la routine, de voir cette pauvrete tous les jours? Une sorte de fatalisme, le sentiment que je ne peux rien faire pour ces gens? Ou l'egoisme du touriste qui vit la pauvrete comme un spectacle qui ne l'implique pas? C'est certainement tout ca, et c'est triste. Mais je crois qu'il y a quelque chose d'autre: je ne peux ressentir de compassion pour des gens que je ne connais pas. Les choses changent quand je me mets a les connaitre. La vue des ventres bombes des petits enfants de mon chamelier, dans le desert, m'a vraiment fait mal au coeur. Cela m'a degoute qu'il depense tellement d'argent en biere, alors que ses enfants etaient manifestement mal nourris. Le petit garcon des gitanes que j'ai rencontre a Pushkar, qui souffrait d'une infection a l'oreille, m'a egalement fait pitie. Alors peut-etre que je ne suis pas une brute insensible, apres tout.
Enfin... Si Jesus, Vishnu ou Allah existent, ou l'un d'entre eux, j'espere qu'ils viendront en aide a tous les misereux de ce pays....
La salete
Beaucoup de gens m'ont prevenu avant mon depart: Tu verras, l'Inde c'est degueulasse... d'immondes dechets recouvrent les rues.. a Old Delhi, tu dois marcher en bottes... les poissons baisent dedans... tu enjamberas des cadavres... les odeurs te prendront a la gorge!!
Ils ont reussi a m'effrayer. Pourtant, je n'ai aucun probleme avec la salete ici. Peut-etre ai-je ete immunise en partie par mon sejour en Chine... Pour moi, il n'y a vraiment pas de quoi pousser des hauts cris. Il est vrai qu'il n'y a pas de poubelles en Inde, que les ordures jonchent les rues. Il est vrai que certaines decharges publiques a meme la rue degagent une odeur atroce, une odeur de mort, melant effluves de pourriture et de caca, que je n'avais jamais sentie auparavant. Mais il est rare de tomber sur de tels endroits. En general, les vaches, chevres,cochons et chiens s'occupent de reduire rapidement le volume des dechets qui s'amoncellent. En fait, c'est pour moi l'une des fonctions des animaux de la rue dans "l'ecosysteme" indiens: ce sont les employes de la commune, preposes a l'elimination des dechets. Il est dommage que ce systeme periclite maintenant a cause de l'apparition du plastique. Pratiquement toutes les matieres, tous les dechets peuvent etre elimines par ces quatre especes d'animaux, meme le papier et le carton prennent le chemin des vigoureux estomacs des vaches et chevres. Mais pas le plastique. Le plastique est un fleau au pays de Shiva.
Beaucoup de gens m'ont prevenu avant mon depart: Tu verras, l'Inde c'est degueulasse... d'immondes dechets recouvrent les rues.. a Old Delhi, tu dois marcher en bottes... les poissons baisent dedans... tu enjamberas des cadavres... les odeurs te prendront a la gorge!!
Ils ont reussi a m'effrayer. Pourtant, je n'ai aucun probleme avec la salete ici. Peut-etre ai-je ete immunise en partie par mon sejour en Chine... Pour moi, il n'y a vraiment pas de quoi pousser des hauts cris. Il est vrai qu'il n'y a pas de poubelles en Inde, que les ordures jonchent les rues. Il est vrai que certaines decharges publiques a meme la rue degagent une odeur atroce, une odeur de mort, melant effluves de pourriture et de caca, que je n'avais jamais sentie auparavant. Mais il est rare de tomber sur de tels endroits. En general, les vaches, chevres,cochons et chiens s'occupent de reduire rapidement le volume des dechets qui s'amoncellent. En fait, c'est pour moi l'une des fonctions des animaux de la rue dans "l'ecosysteme" indiens: ce sont les employes de la commune, preposes a l'elimination des dechets. Il est dommage que ce systeme periclite maintenant a cause de l'apparition du plastique. Pratiquement toutes les matieres, tous les dechets peuvent etre elimines par ces quatre especes d'animaux, meme le papier et le carton prennent le chemin des vigoureux estomacs des vaches et chevres. Mais pas le plastique. Le plastique est un fleau au pays de Shiva.
La Suisse
A l'internet cafe de Diu, il y avait un type qui parlait suisse-allemand au telephone. De tous les gens que j'ai rencontre en Inde, touristes et autochtones confondus, il est le seul qui portait des chaussettes dans ses sandales. Hihihihahou.
A l'internet cafe de Diu, il y avait un type qui parlait suisse-allemand au telephone. De tous les gens que j'ai rencontre en Inde, touristes et autochtones confondus, il est le seul qui portait des chaussettes dans ses sandales. Hihihihahou.
***
J'ai raconte a une travelleuse anglaise comment je me suis fait vilipende par ma voisine de palier, a Zurich, pour avoir sorti ses vetements de la machine a laver (je ne sais plus comment nous sommes arrive sur le sujet). Pour etoffer l'anecdote, je lui ai decrit la facon dont nous partageons la machine a laver commune de la cave, deux jours par appartement tous les deux semaines. She laughed her ass off, l'anglaise, a la description de cette mesquine organisation. J'avais jamais realise que ce reglement de bon voisinage etait propre a la suisse... Peut-etre aurais-je egalement du mentionner que notre container a poubelles etait ferme par un cadenas pour empecher les gens des autres immeubles d'y deposer leurs sacs a ordure. Quoi de plus ridicule! En Inde, les sacs a ordure n'existent meme pas.
04 novembre 2005
Trauminsel Diu
Diu, petite ile sur la mer d'Arabie, fut saisie par le Portugal des le debut du 16e siecle. Les colonisateurs n'en furent chasses qu'en 1961 par les bombardements indiens. Cette ile vit a un autre rythme que le reste de l'Inde. Elle est maintenant colonisee par un bon nombre de backpackers occidentaux qui passent leurs soirees a fumer le shit de Gupta, le dealer local, et a siffler des kingfisher sur les plages de sable. La journee, on parcourt les etroites rues de la ville sur un velomoteur loue et on visite vaguement les quelques attractions: musee de coquillage, fort portugais, waterpark... les indiens, quand a eux, s'amuse a se planter devant les touristes regroupes sur les plages et a les observer comme de curieux animaux.
L'octopus ne fait pas exception a la regle: il jongle et se prelasse au soeil avec sa bande de potes internationale: Marco de Milan et Jonathan de Cork, ses deux colocataires provisoires; Francois et Sylvain, les Quebecois les plus absurdes du moment, avec leurs moustaches, leurs longs cheveux et leurs serviettes de bains sur la tete en guise de turban;
Becks l'anglaise a l'humour tranchant; Bjoerk et Matt Damon, surnommes ainsi a cause de leurs ressemblance a ces stars; Antonio, le Goan gros fumeur de canes, la quarantaine, qui squatte l'ile depuis toujours; Eidan le turc impulsif; Kevin et Hilde, les cyclistes belges qui ont pedales depuis leur plat pays jusqu'ici.
Ce soir, je quitte l'ile pour Varanasi... ce sera un long periple. Certainement pas moins de 35 heures sur les routes bossues du subcontinent... C'est comme retourner dans une fournaise bruyante apres avoir sejourne dans une clairiere paisible. But the fucking trip must go on, man!
Diu, petite ile sur la mer d'Arabie, fut saisie par le Portugal des le debut du 16e siecle. Les colonisateurs n'en furent chasses qu'en 1961 par les bombardements indiens. Cette ile vit a un autre rythme que le reste de l'Inde. Elle est maintenant colonisee par un bon nombre de backpackers occidentaux qui passent leurs soirees a fumer le shit de Gupta, le dealer local, et a siffler des kingfisher sur les plages de sable. La journee, on parcourt les etroites rues de la ville sur un velomoteur loue et on visite vaguement les quelques attractions: musee de coquillage, fort portugais, waterpark... les indiens, quand a eux, s'amuse a se planter devant les touristes regroupes sur les plages et a les observer comme de curieux animaux.
L'octopus ne fait pas exception a la regle: il jongle et se prelasse au soeil avec sa bande de potes internationale: Marco de Milan et Jonathan de Cork, ses deux colocataires provisoires; Francois et Sylvain, les Quebecois les plus absurdes du moment, avec leurs moustaches, leurs longs cheveux et leurs serviettes de bains sur la tete en guise de turban;
Becks l'anglaise a l'humour tranchant; Bjoerk et Matt Damon, surnommes ainsi a cause de leurs ressemblance a ces stars; Antonio, le Goan gros fumeur de canes, la quarantaine, qui squatte l'ile depuis toujours; Eidan le turc impulsif; Kevin et Hilde, les cyclistes belges qui ont pedales depuis leur plat pays jusqu'ici.
Ce soir, je quitte l'ile pour Varanasi... ce sera un long periple. Certainement pas moins de 35 heures sur les routes bossues du subcontinent... C'est comme retourner dans une fournaise bruyante apres avoir sejourne dans une clairiere paisible. But the fucking trip must go on, man!
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