25 mars 2006


Les cieux austraux

Le vaste ciel australien est d'un azur profond, resplendissant, il est presque aussi bleu que celui du Maine, aux Etats-Unis. Oui, le ciel n'est pas si bleu partout... en Inde, par exemple, le ciel est plutot blanchatre.

Mais c'est la nuit que le ciel austral denude ses particularites. Antipodes, ca veut dire: pieds a l'envers, non? Le Sud te retourne, te met la tete en bas, alors quand tu regardes au-dessus de toi, tout est a l'envers aussi. La lune autralienne sur la photo est une lune qui n'y croit pas. Ici, les gens ont la vie grandement facilite par un truc mnemotechnique simple a retenir: la lune croit en C et decroit en D. Le contraire de chez nous. De plus, sous ces latitudes, la lune aime bien se coucher dans une position plus confortable, comme si elle dormait dans un hamac. Parfois, elle est toute horizontale.

Il arrive le meme truc a Orion, jolie constellation qui aime se balader au-dessous de l'equateur. Orion est formee de quatre etoiles dessinant un grand rectangle, au milieu duquel se trouvent 3 etoiles sur une ligne legerement inclinee. Ces trois etoiles sont la ceinture du chasseur. Au-dessous de la ceinture se trouvent deux etoiles l'une au-dessus de l'autre. Dans l'hemisphere sud, ces deux etoiles sont au-dessus de la ceinture.

Ces changements visuels ne sont pas dus a la distance qui separe le nord du sud de la terre, mais au fait que les deux observateurs sont plantes dans une position differente sur la planete. Par rapport a l'observateur europeen, le wombat australien a a peu pres la tete en bas, et vice-versa. Ainsi, l'inclinaison de sa tete pour observer ce qui se trouve au-dessus de lui est differente. L'astre contemple parait etre dans une autre position. C'est comme si deux personnes observaient un motif sur un plafond de deux extremites d'une meme piece.

Beaucoup de choses sont differentes en Australie, mais rien n'offre une incongruite si frappante que la faune autochtone. Les premiers Europeens a visiter la region ont du s'en mordre les orteils de surprise. Les ornithorynques, ovipares et poilus, dotes de tetons et d'un bec de canard, ont ete pris pour un calembour par les premiers zoologues qui les examinerent. En Australie, les cygnes sont noirs au lieu d'etre brun, les arbres perdent leur ecorce et non leurs feuilles, les animaux sautillent a travers les plaines. Les bonds sont une maniere tres futee d'economiser de l'energie: chaque bond active les muscles des poumons vers le haut, puis vers le bas; ainsi, les kangourous ne gaspillent pas d'energie a bouger leurs diaphragmes. La machine marche toute seule.

Contrairement a la croyance repandue par les disciples d'Albion, l'Australie ne fut pas decouverte par le capitaine Cook, mais par des explorateurs hollandais partis d'Indonesie en 1606 (d'anterieures incursions portugaises n'ont pas ete prouvees). Cependant, la visite de Cook en 1770 donna l'impulsion a la colonisation britannique... Cook l'un des personnages les plus illustres de l'empire britannique... ca ne l'a pas empeche de finir a la casserole. A l'epoque ou Jack London visita Hawaii, au debut du siecle dernier, il y avait un vieux chef polynesien qui pretendait que son arriere-grand-pere avait mange le petit orteil du capitaine Cook. Le vieux chef fut emprisonne sur-le-champ pour cette declaration irrespectueuse au glorieux explorateur. En fait, les historiens debattent toujours de la question si le capitaine a ete consomme ou non et s'il s'est fait rotir sur le grill ou bouillir en ragout. Mais le cas echeant... il serait ironique que ce capitaine s'appelait Cook et qu'il finit dans une marmite.

Ca m'a fait pense a un truc. Si c'etait les aborigenes d'Australie ou les Maoris de Nouvelle-Zelande, qui avaient explore, colonise et cartographie l'hemisphere nord? Bin, la consequence principale en serait que toutes les cartes du monde seraient pointees vers le sud. Les cartographes maoris n'auraient pas place leur pays au fond des cartes, c'est sur... L'Europe serait tout en bas des globes terrestres avec la jambe a l'air (la botte italienne, quoi).

Melbourne

Si Canberra est devenue la capitale de l'Australie, c'est que le pays ne pouvait decider laquelle des cites rivales, Sydney ou Melbourne, deviendrait la capitale. Alors on a cree une ville a partir de rien a mi-chemin entre les deux villes.

Pour ma part, entre Sydney et Melbourne, j'ai fait mon choix. Il est vrai que Sydney possede une architecture etonnante et des monuments grandiose. La ville est entouree par de vastes plages et de jolies montagnes. Mais Sydney m'a mal accueilli... Sydney est pleine de stress. C'est une ville qui va trop vite a mon gout. Melbourne a bien plus de charme. C'est une vaste cite aux grands parcs verdoyants, traversee par une belle riviere, bordee par de belles plages. Surtout, la vie y est plus lente, plus detendue. Les cafes et les bars de Melbourne invitent a la jouissance de la perle vitale.

J'ai eu la chance de visiter Melbourne pendant les Commonwealth Games (Commonwealth = les 71 pays qui firent partie de l'empire de la Queen, a l'exception des Etats-Unis; Commonwealth Games = Jeux Olympiques des ex-sujets de la Queen). A Melbourne, pour feter ca, ils avaient construit des enormes poissons en ferraille qui tronaient au milieu de la riviere. Le dimanche soir, lors de la ceremonie de cloture, les poissons se mirent a cracher des feux d'artifices... derriere eux, d'autres feux partaient des sommets des gratte-ciels du centre-ville.


Voici la preuve indeniable que je ne suis pas en vacances en Armenie. Ces trois types, qui me paraissaient fort sympathiques a premier abord, se sont approches de moi et ont revele leur charactere violent. Ils se sont jetes sur moi et, apres m'avoir mis a leur merci, ont tente de m'introduire dans une sorte de poche que l'un des types avait au devant de son ventre (celui tout a droite, c'etait le plus fou des trois). Comme je me debattais comme un damne, ils n'ont pu qu'introduire l'un de mes pieds dans la poche. Mais le type s'est mis a bondir avec moi qui pendouillait lamentablement de son estomac. Hurler comme un pendu ne changeait rien a la determination du type de de me trainer a travers la brousse. Heureusement, j'ai pu agripper une branche d'eucalyptus et sauver ma peau.




De haut en bas. 1. Un vilain reptile qui se sauve dans les brousailles. Ce laid personnage, qui mesurait pres d'un metre cinquante, a croise mon chemin dans une foret australienne. Il a lachement fui dans les hautes zerbes. Je me suis approche a pas de loup pour faire son portrait. Pour eviter que mes pas ne craquent sur les feuilles seches, j'ai emprunte des troncs d'arbres morts couches dans les herbes. Ainsi, j'ai pu m'approcher a trois metres environs. Sur quoi, le reptile est alle se cacher derriere un arbre, le museau tendu pour m'observer. Puis il a disparu dans les meandres tenebreux de sa saurienne existence. 2. Il y a plein de fougeres au pays de Kylie. 3. A 4. O



A Mallacoota, sur la cote a mi-chemin entre Sydney et Melbourne.
Encore quelques petits trucs sur l'Indonésie

A Jogjakarta, il y a beaucoup de petits marchands-cuisiniers qui sillonent les rues pour vendre des repas. Ils ont des petits charriots a roulette qu'ils poussent devant eux. Le charriot a un petit toit et est equipe d'un rechaud a gaz et de tous les instruments necessaires a la cuisine. Les restaurants ambulants annoncent leur arrivee avec une petite musique ou un son particulier. Il m'a fallu plus d'un mois pour decouvrir que chaque son correspond a un type de nourriture particulier. Par exemple, les marchands qui jouent la melodie de la lambada vendent du pain sucré. Ceux qui preparent des soupes de nouilles aux petites boules de viande tapent sur un bol avec une cuillere en passant dans les quartiers. Ceux qui grillent des brochettes tapent sur un bout de bambou creux... etc. Ainsi, les gens restent chez eux et ecoutent la musique de la nourriture qui passe devant chez eux. Quand le repas correspondant a la musique les fait saliver, ils sortent pour acheter leur diner. A Jogjakarta, il y a environ une dizaine de sons differents. Mais a Jakarta, il y a des dizaines de musiques differentes, chacune liee a un repas particulier.


***
A Jogjakarta, on mange dans la rue de petits oiseaux rotis, de la taille de petits moineaux. Ca s'appelle du pouyou. C'est delicieux.
***
En Indonesie, je me suis habitue a manger tres piquant. J'ai remarque que le piment rend dependant. Je ne peux plus me passer de piment. En Australie, c'est extremement difficile a trouver. Meme quand ils te disent que c'est piquant, ca l'est pas.
***
En Indonesie, les mariages entre personnes de differentes religions sont interdits. Ce n'est souvent pas un tres gros probleme. Il suffit que l'un des deux amoureux (et sa famille) soit dispose a changer de religion pour arranger la chose. Parfois, les deux changent de religion, pour eviter toute dispute. Ma prof de cuisine a Jogja etait balinaise, donc hindou, et son fiance musulman. Ils sont les deux devenus chretiens.
Le seul obstacle dans les changements de religion est la circoncision, bien sur...Tout male devra se faire trancher le prepuce pour adopter l'islam.
A ce propos, l'equivalent de la circoncision pour les filles, l'excision, est couramment pratiquee dans les pays musulmans. Il ne faut pas la confondre avec les pratiques de certains pays africains ou le clitoris des jeunes filles est carrement ampute, ce qui peut donner suite a de graves troubles de sante et les privent de plaisir sexuel. En Indonesie, on enleve pas de chair, mais on pratique une coupure sur le clito, d'un petit coup de couteau: tchac! Le plaisir sexuel n'est pas diminue.
***
La peau des filles indonesiennes a une adorable couleur cafe au lait. Malheureusement, elles veulent absolument rendre leur peau plus blanche. C'est une veritable obsession de la paleur. C'est lamentable. Il y a des pubs pour des cremes blanchissantes partout.
***
Dans les chambres d'hotel a Java, il y a toujours une petite fleche sur le plafond qui indique au fervent la direction de La Mecque.

19 mars 2006





De haut en bas: 1. L'opera de Sydney 2. L'endroit d'ou a ete prise la photo numero 1. 3. L'opera de Sydney (ce machin est tellement photogenique, il est difficile de louper une photo) 4. L'endroit d'ou a ete prise la photo numero 3.

L'opera de Sydney

J'ai decide de mettre plus de serieux et de consistence a mes seances photographiques. En prenant des photos de l'opera de Sydney, je decidai que dorenavant je prendrais toujours en photo l'endroit d'ou je prends une photo, afin d'assurer une vue d'ensemble sur le paysage au spectateur. A partir de maintenant, je prendrais donc systematiquement deux photos. L'une du sujet et l'autre de l'endroit d'ou je photographie. Le resultat, vous le voyez ci-dessus.

J'ai ete enthousiaste a mettre mon idee en pratique. Ce n'est qu'apres m'etre eloigne de l'opera que j'ai remarque qu'il y avait une faille a ma demarche. En effet, si je voulais suivre mon idee jusqu'au bout, je devais egalement prendre en photo l'endroit d'ou j'ai pris la photo de l'endroit ou j'ai pris la photo. Evidemment, il faut que cette derniere photo soit prise de l'endroit ou a ete prise la premiere photo; sinon, on tourne en rond. La methode correcte consiste donc a commencer par prendre deux photos: l'une du monument ou paysage, le sujet de base, et l'autre de l'endroit d'ou l'on photographiera l'endroit ou l'on se trouve presentemment. Ensuite, de ce dernier endroit, on prendra en photo l'endroit d'ou l'on a pris les deux premieres fotos. C'est tres simple. C'est trop complique. J'ai abandonne cette idee stupide.

18 mars 2006

A chaud. Arrivee a Sydney. J'ai debarque sur le sol oceanien en titubant, encore somnolent sous l'effet du (quart de) somnifere avale dans l'avion. Le zele representant des douanes australiennes ne m'a pas laisse souffler. Il m'a fait deballe tous mes machins. Sous ses yeux malveillants, mes boules de jonglage se revelerent criminelles, porteuses potentielles de germes meurtriers. Tout produit vegetal est interdit d'importation en Australie. Mes boules, remplies de graines, furent saisies sur le champ. Ainsi, la cruaute sans borne du gouvernement australien me privent de mes jongleries.

Autre resultat de la fouille: j'ai remarque que ma reserve de kreteks (cigarettes au clou de girofle) a ete subtilisee de mon sac a dos au cours du voyage.

Dans l'avion de Singapour a Sydney, ils ont servi du fromage. Du fromage! Cinq mois que je n'en avais pas ne serait-ce que lechouille le moindre morceau. Quel bonheur. Incontestablement, le plus beau moment de tout mon voyage.

Impressions. En arrivant a Sydney, je me suis senti comme un petit paysan qui arrive dans la grande ville de sa paisible campagne natale. Pourquoi les gens ils sourient pas? Pourquoi sont-ils tout stresses par leur boulot? Des mon premier jour, je me suis fait vilipender par le concierge de mon hotel. C'est ca l'occident? Je veux rentrer en Indonesie!!

14 mars 2006





La vie a Jogja.
Les recettes de l'Octopus: Gulai Ayam (poulet a la mode du goulag)

Shpaglou pour 2 personnes:

300 grammes de poulette, en filet ou en os. 7 dl de coco-lait. 1 cs de palme-huile (alternativement, d'olive-huile on se contentera).

Mistok-mistok: 1 piment rouge (pour un plat bien epice, un petit piment on choisira; en cas de palais sensible, les graines du piment on extraiera). 2 petites chalottes. 2 gousses d’ail. 1 cc de coriandre. 1 demi-racine de curcuma (aussi appele tumeric) ou 1 cc de curcuma en poudre. 1 morceau de racine de gingembre. 1 clou de girofle. Un peu de noix de muscade. Une pincee de sel. Un chouia de sucre.

Zeflipi: 1 feuille de laurier. 1 feuille de citronnelle, 1 feuille de citronnier. 1 demi-baton de cannelle.

Un cd de musique.

Un verre de vin rouge.

Un adjoint-cuistot aux oreilles propres.

- Le cd de musique, introduisez dans l'appareil prevu a cet effet.
- Le vin rouge, buvez dans l'oreille droite de votre aide-cuistot et celui-la renvoyez chez lui.
- La poulette, coupez en chtits bouts pas trop petits.
- La chalotte et l'ail, coupez grossierement. Puis les passez au mixer en compagnie du reste du mistok-mistok. Si vous disposez d’un machin en pierre pour ecrasez les epices, pas n’hesitez. Cela doit resultat avec une pate juteuse et odorante.
- Avec force flammes, faites revenir la pate du mistok-mistok dans la palme-huile pendant un court intervalle temporelle, jusqu’a ce que les narines votres soient flatte d'effluves pimentees.
- Y ajoutez, les zeflipi.
- Y ajoutez, la poulette, la rotir a moitie jusqu’a ce qu’elle soit un peu bronzee.
- Y ajoutez, le coco-lait, le bien melangez. Laissez mijoter le tout pendant une demi-heure a petites flammes, en spatulant regulierement.

C’est prêt. Avec de la salade et du riz blanc ou jaune servir.
La Papouasie: pas pour cette fois

Fins observateurs que vous etes, vous n'avez pas ete sans omettre remarquer que les photos ci-dessous ne representent point de belliqueux papous a demi-nus, ceci malgre les annonces intempestives de l'Octopus d'etre sur le point de visiter la Nouvelle-Guinee. C'est que ce projet a ete victime des vicissitudes de mon voyage.

Un voyage d'une demi-annee ne se vit pas comme des vacances de quelques semaines. La fougue des debuts, qui s'exprime dans la visite d'un enorme nombre de temples, parcs nationaux et autres, s'etiole par la suite, ettouffee par les instincts sedentaires. Bref, on se lasse de trop bourlinguer. Apres cinq mois a trotter aux quatre coins de l'Asie, des neiges de l'Himalaya aux profondeurs de la mer des Celebes, l'Octopus avait besoin d'une cahute ou reposer ses tentacules fatiguees. Tel un vieux chalutier rouille qui a passe trop longtemps en mer, il a decide de jeter ancre dans un port accueillant pour lecher ses plaies. De fraiches forces, des jarrets reposes lui seront indispensables pour la derniere partie de son voyage a SydnezAucklandFidjiSanFranciscoMontreal.

Malheureuse victime de mon besoin de repos: la Papouasie, destination mystique.

Il est vrai que d'autres facteurs ont inflechi ma determination a aller visiter les farouches papous. Le temps a disposition avant mon vol pour Sydney (une quinzaine de jours) ne suffisait pas pour un pays comme la Nouvelle-Guinee, ou les transports sont intermittents, la jungle impenetrable et la langue obscure a mes oreilles. Ceci d'autant plus que j'aurais du attendre quatre jours pour obtenir un visa du consulat de Papouasie Nouvelle Guinee a Jayapura. D'autre part, la personne a laquelle je comptais rendre visite, ex-voisin prevotois missionaire dans un village papou, etait par malchance absent de sa station pendant la periode a laquelle je comptais voyager.

Troisieme obstacle, la Papouasie indonesienne est actuellement sujette a des troubles politiques, dus aux circonstances suivantes. Une entreprise americaine, Freeport, exploite une mine d'or en Papouasie, pres de Timika. La population voisine de la mine, qui vit dans une extreme pauvrete, arrondit ses fins de mois en cherchant des pepites dans les dechets rocheux rejetes par la mine. Or, Freeport, qui affirme que cette pratique est illegale et "dangereuse", a interdit l'acces du depot de dechets aux tribus. Les forces de securite de la mine ont alors ete confrontee a l'ire des autochtones. Deux hommes ont ete touches par des fleches. Sur la demande de Freeport, Jakarta a envoye un bataillon pour proteger la mine. Apres cela, les manifestations se sont multipliees a Jayapura et a Jakarta. Les manifestants demandent la modification du contrat signe entre le gouvernement indonesien et la compagnie americaine pour l'exploitation de la mine. C'est un scenario qui se repete dans les pays du tiers-monde riches en matiere premiere: la compagnie etrangere graisse la patte du gouvernement pour exploiter les mines, privant la population locale des richesses de ses terres... Dans le cas de Freeport, ceux-ci ne laissent meme pas les miettes de leurs dechets aux autochtones.

Pour en revenir a mon voyage... J'avoue que la tentation de rester quelques jours de plus en Indonesie a savourer des kreteks a ete pour quelque chose dans ma decision. Pipin, la jeune fille qui hume une fleur sur le blog du ... n'est pas non plus totalement etrangere a ma decision.
Ainsi, je vaque a Jogja, Java. Sur ma Honda, je sillone dans la ville en me faufilant entre les controles de flicaille (j'ai pas de permis de moto). Quelques jours a chevaucher une moto dans les rues d'une ville bourdonnantes de trafic est le meilleur moyen de prendre le pouls de l'Asie du Sud-Est. Le soir, je suis le scooter de Pipin a travers les ruelles. Gourmette incorrigible, elle me mene dans les meilleurs restaurants de rue de la ville. On s'accroupit sur des nattes en osier sur le macadam et on mange avec les mains, du canard frit a la poudre de coco ou du poisson grille avec plein de piment dessus. La journee, quand je suis pas a ecrire sur le blog, je fais du shopping et je me prelasse dans la piscine de mon hotel. Je suis alle visiter encore une fois les temples environnant, Borobudur et Prambanan, avec mon papa, qui est venu me rendre visite de la Malaisie.

Evidemment, le regret m'envahit quand je pense a ce que j'ai manque, cette Papouasie qui fait saliver mes instincts de globe-trotter. Mais ce n'est que partie remise... je compte bien conquerir cette terre qui m'a echappe des que l'occasion s'en presentera... Peut-etre dans 6 mois, peut-etre dans 10 ans, peut-etre dans 20 ans.

L'histoire de la Papouasie

Mais laissez-moi vous compter pourquoi la Papouasie me fascine, me fascine comme Faye Dunaway dans Arizona Dream: "Si tu prononces encore une fois les mots: chez les Papous, je ne repond plus de rien! " C'est quand ils sont a table, la fille s'acharne a lacher ses tortues sur la table pendant que la mere radote sur les habitudes des papous. Quand la mere repete: "Chez les Papous, chez les papous, chez les papous!!", la fille tente de se pendre avec ses bas au lustre de la salle a manger.

La Papouasie est la deuxieme plus grande ile du monde, pourtant peu de gens savent ou elle se trouve. C'est certainement l'une des regions les plus meconnues et inexplorees au monde. Politiquement, historiquement, il en est alle ainsi de la Papouasie. L'ile fut colonisee il y a plus de quarante mille ans par un peuple aux memes origines que les aborigenes d'Australie. Les peuples asiatiques qui coloniserent l'Indonesie il y a quelques milliers d'annees ne reussirent pas a s'implanter en Papouasie, parce que leurs cereales et autres plantes de cultivation n'etaient pas adaptees aux hauts plateaux de l'ile. C'est pourquoi, encore aujourd'hui, la Papouasie est peuplee par une ethnie entierement differente de celles rencontrees dans l'archipel. Lorsque les Europeens se mirent a imperialiser le monde, l'ouest de la Papouasie fut soumise au joug hollandais, tandis que la moitie orientale etait colonisee par l'Allemagne et l'Angleterre. Cependant, l'influx de colons europeens est reste tres modere. Cela est du a la malaria qui a tue une bonne partie des courageux qui ont tente de s'y etablir.

L'est de l'ile est maintenant independant, formant la Papouasie Nouvelle Guinee, dont le chef d'etat est la reine d'Angleterre, comme en Australie. L'Indonesie s'est emparee de l'autre moitie de l'ile en 1969 au moyen d'une honteuse fraude electorale, etouffant par la suite les mouvements independantistes par une repression sanglante (j'ai lu que 200'000 personnes ont ete tuees par l'armee indonesienne dans ce combat).

La Papouasie est celebre pour ses tribus sauvages et anthropophages, qui "vivent encore a l'age de pierre". Cela merite une explication, et si je peux vous la donner, c'est parce que j'ai lu "Guns, germs and steel" de Jared Diamond, que je conseille avec enthousiasme a toute personne qui s'interesse aux details passionant de l'histoire humaine (par exemple, ce livre explique pourquoi les lettres sont disposees comme elles le sont sur nos claviers d'ordinateurs et pourquoi les 150 conquistadors de Pizarro ont mis en deroute l'armee d'Atahualpa a Cajamarca, forte de 80'000 guerriers). Voila: bien que les populations humaines de Papouasie se soient mises il y a fort longtemps a cultiver des plantes pour se nourrir, elles n'ont jamais reussi a en cultiver de facon suffisante. Cela est du au fait qu'il n'existe que tres peu de plantes sauvages, en Papouasie, qui sont adaptees aux besoins de la cultivation. De plus, les papous n'ont pas pu adopter les cereales cultivees par les autres peuples d'Asie du Sud-Est, car celles-ci sont inadaptees au climat local (la plus grande partie de l'ile se trouve en haute altitude). Donc, pas de riz, pas de ble, pas de mais. Les tribus papoues n'ont pu que completer leur alimentation par la cultivation de taro et de patates douces. Mais elles ont du continuer a chasser pour l'essentiel de leur diete. L'anthropophagie decoule en grande partie des carences en proteine de la population. Cette pauvrete en nourriture explique egalement que la population papoue n'a jamais connu d'explosion demographique, ce qui a empeche la formation de societes plus complexes et a eu pour consequence que les papous sont toujours organises en tribus. Du coup, ni ville, ni royaumes en Papouasie; ni ecriture, ni metallurgie, qui necessitent une societe complexe qui puisse nourrir des personnes passant leur temps a autre chose que la recherche de nourriture.

Notez qu'une explication similaire s'applique aux aborigenes d'Australie qui chassaient et cueillaient toujours lorsque Cook arriva sur les cotes australiennes. J'aime ces explications qui discreditent les theories racistes qui pretendent que certains peuples n'etaient pas assez futes pour developper une "civilisation digne de ce nom".

Les langues

Pour en venir aux faits: la structure de base de la population papoue est toujours la tribu, groupe d'une centaine de personnes. Ces tribus vivent sans contacts, ou presque, les unes avec les autres, separees qu'elles le sont par la jungle impenetrable, de hautes montagnes et de vastes etendues marecageuses. Cela explique la richesse linguistique monumentale de la Papouasie. Le recensement de ces langues n'est, semble-t-il, pas encore acheve, parce que les chiffres oscillent, selon les livres, entre 500 et 1000 langues pour la totalite de l'ile. Il faut preciser qu'il ne s'agit pas de differents dialectes qui se ressemblent, mais bien de langues bien distinctes, souvent sans aucune ressemblance!

L'anthropophagie

Je ne crois pas qu'il existe encore des tribus cannibales en Papouasie. Quoi qu'il en soit, a l'epoque de l'anthropophagie, celle-ci n'etait pas pratiquee en tant que "chasse a l'homme"; c'est-a-dire, on n'allait pas chasser les types de la tribu d'a cote pour se nourrir. Mais lorsqu'une guerre avait lieu (elles etaient frequentes), on mangeait les guerriers ennemis tues au combat. D'autre part, certaines tribus avaient pour coutume de manger les personnes qui mourraient dans la famille. Selon la tradition, on gardait ainsi l'energie de la personne decedee dans son corps. Je trouve que c'est une belle idee.

La nature

La jungle papoue est la plus grande foret tropicale du globe apres l'amazonie. Elle couvre un pays montagneux. La plus haute montagne de l'ile atteint cinq mille metres d'altitude. Positionee juste au-dessous de l'equateur, la Papouasie accueille de la neige sur ses sommets! Comme la Papouasie faisait autrefois partie du continent australien avant d'en etre coupee par un bras de mer, sa faune est . Les forets sont peuples de marsupiaux, de kangourous des arbres et de casoars. L'espece la plus connue est l'oiseau de paradis; les cotes sont hantes de crocodiles de mers et les forets infestees de 800 especes d'araignees. Encore a l'heure actuelle, des nouvelles especes de mammiferes et d'oiseaux sont decouvert dans les reculees des montagnes papoues.

13 mars 2006










De haut en bas: 1. Sur son trone, devant Jogjakarta sa vassale, Gunung Merapi observe avec majeste les vains avatars de la vie humaine. 2. Le sympathique jeune homme qui m'a accompagne pour l'ascension du volcan. 3. Une peuclo de psychopathe. 4. Merbabu la tete en bas. Merbabu, voisin de Merapi, est un vieux volcan affable qui s'est assoupi. 5. Merapi s'eleve de facon vertigineuse au milieu des etendues javanaises. De son sommet, on domine les nuages qui pese sur la plaine. 6. La fumee de soufre suffoquante, sur le cratere, cache les vilains furoncles jaunatres de la roche. 7. Une fissure dans la planete. 8. Un type. 9. Descente mystique dans la brume.

Merapi, deuxieme essai

Certes, l'ascension de la montagne de feu ne s'est pas termine dans une pluie de cendres ou dans un bain de lave. Mais je n'irai pas jusqu'a affirmer que l'ascension fut sans histoire. Premier fait notoire: notre guide fumait les plus grosses clopes que j'aie jamais vues. Je crois que le temps de fumette d'une marlboro est approximativement de quatre minutes. Les cigarettes de notre cabri local durait environ une demi-heure. Je l'appelle cabri en raison de la vivacite de ses jarrets. Pendant les sept heures de temps qu'a dure notre excursion, il n'a pas arrete de sautilller allegrement de rocher en rocher, alors que nous soufflions et boitions miserablement.

En approchant du sommet, il fut extremement interessant de voir la croute terrestre devenir fantasque sous nos semelles. A une centaine de metres du cratere, ca s'est mis a fumer dans tous les coins. De la vapeur d'eau qui s'echappait d'interstices dans le caillou. Puis la terre a attrape la fievre, la roche est devenu toute chaude. Arrive au sommet, on a ete couvert d'un gros nuage, la brume se melant aux fumees s'echappant du cratere. Les flatulences de la planete sont devenues si fortes, lorsque nous nous promenions aux abords du cratere, que nous avons ete completement enveloppes par les volutes parfumees a l'oeuf pourri. Ca nous a fait suffoquer et on ne voyait plus le caillou sous nos pieds. Apres quelques dizaines de secondes, la fumee de soufre s'est dissipee. Nous avons alors decouvert d'etranges dessins sur les pierres, des fissures jaunatres d'ou s'echappait je ne sais quelle obscur sueur planetaire.

A la descente, mon genou m'a lache et la pluie m'a rince. Le trek a petits pas humides. J'en boite encore.

10 mars 2006


Apprendre l’indonesien en riant avec Luki Luki (Des rails sur la prairie). J’avoue n'avoir pas encore decouvert comment dire “pied-tendre” et “corne verte” en bahasa.

Les charmes du Bahasa

13000 petits bouts de terre ont emerge des profondeurs oceaniques pour former l’archipel indonesien. Entre ces ilots, 7000 sont habitees, depuis des milliers d'annees, par homo sapiens, espece derivee du singe qui passent son temps a fumer des plantes sechees et a inventer des trucs inutiles. Homo sapiens a egalement mis a profit son temps libre pour se diversifier en des centaines de peuplades differentes, qui ont evolue independamment les uns les autres, creant leurs propres dialectes. Ainsi, l'Indonesie est un enorme patchwork linguistique. Dans la seule Papouasie indonesienne, plus de 500 blablas bien distincts sont parles par les differentes tribus. Par consequence, l’unite de la nation indonesienne depend essentiellement du Bahasa Indonesia, literalement: langue indonesienne, qui est parle par la quasi-totalite des habitants de l’archipel et leur permet de communiquer entre eux. Le bahasa est la langue de l’education et celle du gouvernement.

Dans la plupart des pays du monde, la langue nationale decoule du dialecte de l'une des regions du pays. Le francais etait le parler de l'Ile-de-France, l'italien le baratin de Florence. Dans d'autres pays, la langue nationale a ete imposee par une puissance colonisatrice ou apportee par les nouveaux habitants du pays. Chose etonnante, en Indonesie, on ne constate aucun de ces deux scenarios. Le bahasa n’a jamais ete parle en tant que langue maternelle dans l'archipel, et ne l'est toujours pas. Il n'a pas non plus ete impose par une puissance exterieure.

Pendant des siecles, le malais a ete utilisee comme lingua franca a travers les multiples iles indonesiennes, permettant la communication entre marchands et entre monarques. Cela s'explique certainement par l’influence des marchands malais a l'epoque. Ainsi, lorsque l’etat indonesien fut cree en 1949, on ne choisit pas le javanais ou un autre dialecte comme langue nationale, mais, logiquement, le malais, deja utilise depuis longtemps pour s'entendre entre les ilots. Il faut preciser que l'indonesien n'est pas exactement la meme langue que le malais. Les deux langues se differencient par quelques variations dans la prononciation. Resultat de cette singuliere evolution, tous les Indonesiens parlent le bahasa en tant que deuxieme langue, mais continuent d'user de leurs dialectes respectifs au logis et avec leurs amis. Il arrive egalement qu'ils melangent subrepticement le bahasa avec leurs dialectes pour converser.

Venons-en a la langue elle-meme: le bahasa... le bahasa est une langue remarquable par sa beaute et sa simplicite!

Le bahasa est une langue qui se laisse agreablement derouler sous le palais. C'est une langue de voyelles, et les voyelles, ca rythme la langue, la rend sonore et melodieuse. Le bahasa n'est pas embarasse par de vilaines consonnes sur lesquelles les cordes vocales butent dans leurs elocutions. Les R ne se raclent pas du fond de la gorge, mais se roulent a petits coups de langue sur le palais. Le bahasa est joli, on se delecte a l'ecouter. Le bahasa n'est jamais criard. En fait, en bahasa, on n'eleve jamais la voix. Au fond, j'ignore s'il s'agit d'un trait culturel des habitants de l'Indonesie, ou si cela est interdit par les proprietes de la langue elle-meme; dans tous les cas, en Indonesie, on ne crie pas, meme quand on n'est pas content. Cela colle bien avec l'habitude des indonesiens de sourire continuellement... Les indonesiens sont un peuple jovial et paisible.

Je n’ai certes pas appris le bahasa comme je l'eus voulu souhaite. Les innombrables plages de sable ont genere une certaine flemmardise qui a nuit a mes ambitions. D'autre part, j'ai passe beaucoup de temps sur des iles ou l’anglophonie est (trop) courante: Bali et Lombok, en particulier. Heureusement, mon voyage a Sulawesi a donne un coup de pouce (ou un coup de pied au cul, suivant de quel point de vue on considere la chose) bienvenu a mon apprentissage. Mon sejour a Jogja est l'occasion de prendre quelques cours et de parfaire mon vocabulaire en lisant de la litterature vulgaire (voire photo). Je baragouine maintenant assez bien le bahasa pour tenir une conversation. Et pour vous parler de ses charmes.

Bien que Java possede une ecriture traditionnelle proche de celle utilisee en Thailande, l’Indonesien s’ecrit avec l’alphabet latin, peut-etre a cause de l'influence hollandaise. L’orthographe du bahasa ne presente aucune difficulte: il s’ecrit exactement comme il se parle, contrairement a la langue que j'utilise en ce moment. Sa grammaire, elle, deconcerte par sa simplicite. Cette nudite grammaticale s'illustre au mieux par la liste des difficultes classiques absentes en Indonesien: la conjugaison, les temps des verbes, les cas, les genres, l’accord des adjectifs, l’accord des noms… La langue indonesienne est deja presque toute nue quand on la rencontre pour la premiere fois. Il suffit de laisser glisser son leger sarong le long de ses hanches pour la connaitre dans son intimite. C'est tellement facile, en fait, que c'en est presque rageant, pour des types comme nous qui nous sommes acharnes pendant des annees a apprendre joujoucaillouhibou et les malditas declinaisons teutonnes. Le bahasa prouve bien qu'une langue peut marcher sans toutes ses conneries.

Alors, comment ca marche, m'interrogerez-vous? Bin, le bahasa, c'est un peu du petit negre. De par sa structure, il ressemble enormement au chinois.

Les verbes ne se conjuguent pas et n’ont pas la fonction de marquer le present, le passe ou le futur. Cette fonction est remplie soit par de courts mots qui signifient "deja", "pas encore" ou "jamais", soit par d’autres qui indiquent directement la position temporelle de l'action (comme “akan” pour le futur) ou par des indications de temps ("hier", "quand tu auras fini ta soupe" ou encore "il y a 30 siecles").

Les prepositions “le” ou “un” ne sont utilisees que lorsqu’elles sont strictement necessaires. Les prepositions signifiant “je”, “moi”, “mon”, “mes” sont regroupees en un seul mot. Le pluriel est indique par le dedoublement du mot (comme en chinois). Cependant, le nom n'est dedouble que lorsque c'est necessaire; si un quelconque mot dans la phrase indique que le nom est au pluriel, le dedoublement devient superflu.

Un exemple. Banane=pisang. Des bananes = pisang pisang. Je, moi: aku. Mes bananes = pisang pisangku (aku est ici contracte et colle au sujet). As-tu mange tes bananes = Toi deja manger banane banane toi? = Kamu sudah makan pisang pisangmu?

Moi, j'adore la complexite de la langue francaise... Je trouve que les subtilites du francais font toute sa beaute. Bien que l'allemand m'a fait suer, souffrir, m'a torture jusque dans mes entrailles, je decele quelque chose d'admirable dans sa structure stricte et solide, qui en fait une langue a la precision quasiment diabolique. Ce n'est donc pas moi qui vais cracher sur les langues europeennes, ni meme sur l'academie francaise. Neanmoins, je me demande objectivement quel peut bien etre l’interet de parler des langues compliquees comme les notres, qui sont le cauchemar des ecoliers qui les apprennent. Je crois que les possibilites de s'exprimer ne sont nullement reduites par la structure simplifiee du bahasa.

La plus grande difficulte de l’indonesien reside dans l’apprentissage du vocabulaire. Il n’y a evidemment que tres peu de mots qui presentent des similarites avec les langues latines ou germaniques (bien que le bahasa ait emprunte quelques mots au hollandais et au portugais). En outre, le bahasa presente un systeme de suffixes quelque peu epineux... Cependant, les prefixes sont bien pratiques. Ainsi, pour faire une phrase a la forme passive, il suffit d'ajouter une syllabe devant le verbe. Pour exprimer le superlatif, on colle trois lettres a l'adjectif. Les prefixes deviennent irritant lorsqu'ils se collent aux deux bouts aux chaussettes (prefixes) et aux cheveux (affixe) d'un seul mot en meme temps. L'avantage est qu'il est facile de former de nouveaux mots (ou de deviner la signification de ceux-ci) une fois qu'on connait la base; les suffixes regroupent les mots de signification similaire autour d'une base commune. L’importance du systeme de suffixes est soulignee par le fait que tous les mots d’une meme famille sont regroupes dans le dictionnaire. Le mot “penjualan” (suffixes pen- et -an), par exemple, ne se trouve pas sous p dans le dictionnaire, mais en dessous de "jual”. Ainsi, il est indispensable d'extraire la base du mot pour en decouvrir la signification dans le dictionnaire.

Pour finir, voila quelques particularites de l’Indonesien et quelques mots que je trouve charmants.

* En bahasa, on ne repond pas souvent aux questions par "oui" ou "non", mais plutot par "pas encore", "deja", ou "jamais" (respectivement belum, sudah, tidak pernah). As-tu jamais mange du marshmallow au fromage? Pas encore. As-tu leche le sabot de ce cheval? Deja.

* Prete a confusion: mencium (prononcer menchioum) signifie faire des bisous, mais aussi sentir (avec le pif). Marah = en colere. Ramah = sympathique.

* Le verbe etre n'est pas utilisee dans la langue orale indonesienne. Je suis le roi du monde = je roi du monde. Encore un truc qui simplifie les choses.

* Les Indonesiens ont coutume d'engager la conversation en disant: "Mau ke mana?", c'est-a-dire: "Ou vas-tu?", plutot que par "Comment ca va?" (Apa kabar?). C'est assez deconcertant, a premier abord, et meme un peu agacant. Cette facon singuliere de saluer m'a rappele l'Irlande ou on interpelle plus souvent par "Lovely day, isn't it?" que par "How is it going?" (les irlandais repondent invariablement a la deuxieme question par "Not too bad, yourself?". A la premiere question, on ne sait jamais quoi repondre.)

* Il existe deux mots differents pour "nous", selon que la personne qui parle veuille inclure son interlocuteur dans le sujet de la phrase ou non. Nous avec l'interlocuteur: kita. Nous sans l'interlocuteur: kami. Ca aussi, c'est comme en chinois.

* Les mots "frere" et "soeur" n'existent pas en bahasa. L'indonesien distingue les freres et soeurs par leur age, non par leur sexe. Frere/soeur cadet = adik. Frere/soeur aine: kaka. On ajoute ensuite garcon ou fille au mot pour former "frere cadet" (adik laki-laki) ou "soeur ainee" (kaka perempuan).

* En Indonesien, “vieux” se dit differemment, qu’il s’agisse de choses ou de personnes.

* De jolis mots. Le papillon = kupu-kupu. La fleur = bunga. L’araignee = laba-laba. Le dauphin = lumba-lumba. Le canard = bebek. Le soleil est “mata hari”, literalement: l’oeil du jour. J'ai les fourmis aux pieds = Saya kesemutan di kaki. La rue = jalan. Se promener = jalan-jalan.

* Petit bonus culturel: Les prieres, qui s'echappent des hauts-parleurs en plastique pour rythmer les journees indonesiennes, sont toujours prononcees en arabe, comme dans tout le monde musulman. Les ecoliers musulmans apprennent des bases d'arabe pour comprendre le Coran.





Le marche aux oiseaux de Jogjakarta

De haut en bas: 1. Roi aux yeux jaunes, prends-moi sous ton aile 2. Rouge perroquet, heberge-moi sous ton pelage 3. Chien volant de la nuit, avale ta langue pointue, tu es vegetarien 4. Chico, chico, porque me estas mirando, el tiburon te va a comer 5. Hehe. Ca m'a fait pense a Gary Larson, cette image. Ce python devait faire au moins cinq metres de long. Sa queue depassait nonchalamment de sa boite en bois, dans l'indifference generale. A ses cotes, les petites souris blanches s'agitaient, en attendant de servir de souper a la bete (presume-je).



Prambanan, temple hindou.

De haut en bas: 1. Les Dieux de Prambanan ont le regard doux et melancolique, malgre leurs ames de caillou. 2. J'ai d'abord cru qu'il s'agissait d'Hanuman, le Dieu-Singe, dont le temple vient d'etre attaque a Varanasi. Mais non, il s'agit plutot d'un demon d'une epopee vedique. 3. La silhouette de Prambanan, qui embellit Java depuis plus de mille ans.




Borobudur, temple bouddhiste

De haut en bas: 1. Ce bouddha mineral jouit de la meme vue panoramique depuis un millier d'annees. Sa vie n'est ponctuee que par de rares eruptions volcaniques. Il s'en fout, il passe son temps a mediter. 2. Il est interdit de se gratter sur le temple. 3. La silhouette dentelee de Borobudur, le temple-legende de Java. 4. Doigts de pierre.